Cardiologie

HTA résistante et hyperaldostéronisme primaire : l’ablation par radiofréquence de l’adénome est possible

L’ablation par radiofréquence trans-gastrique guidée par endoscopie (EUS-RFA) pourrait offrir une option de traitement moins invasive pour les adénomes producteurs d’aldostérone situés dans la glande surrénale gauche, avec un bon profil de tolérance et un potentiel de guérison complète ou partielle de l’hyperaldostéronisme et de l’hypertension.

  • Siarhei Khaletski/istock
  • 11 Fév 2025
  • A A

    L’hyperaldostéronisme primaire (ou maladie de Conn) est responsable de 5 à 13 % de l’ensemble des hypertensions artérielles, voire de 25 % des formes résistantes. Son retentissement cardiométabolique est particulièrement important, avec un risque de complications au moins deux fois supérieur à celui des hypertensions essentielles de même âge et sexe.

    Malgré l’indication à un diagnostic et une prise en charge rapide, les options thérapeutiques n’ont guère évolué ces 30 dernières années : elles reposent principalement sur les antagonistes des récepteurs aux minéralocorticoïdes (souvent mal tolérés, en particulier chez l’homme) et à la surrénalectomie totale en cas de localisation unilatérale certaine du foyer hyperproducteur. Or, l’échantillonnage veineux surrénalien (adrenal vein sampling ou AVS), encore considéré comme la référence pour établir cette localisation, est invasif et parfois infructueux, freinant la prise en charge optimale.

    Un diagnostic plus facile avec le TEP-scanner et des marquers spécifiques

    Récemment, l’imagerie moléculaire utilisant le [11C]-metomidate; ([11C]-MTO ou son analogue para-chloro-2-[18F]fluoroethyletomidate ([18F]-CETO a ouvert la voie à une cartographie précise des adénomes producteurs d’aldostérone en TEP-scanner. En parallèle, l’émergence de l’ablation par radiofréquence trans-gastrique guidée par échoendoscopie (EUS-RFA) a été explorée comme approche thérapeutique ciblée, en particulier pour les adénomes producteurs d’aldostérone du côté gauche (glande surrénale contiguë à l’estomac).

    Dans l’étude, dont les résultats sont publiés dans The Lancet, 28 patients (21 hommes et 7 femmes, âge moyen 57,7 ans) ont bénéficié de 35 procédures d’EUS-RFA. Aucune complication majeure prédéfinie (perforation gastrique, hémorragie, infarctus) n’a été rapportée dans les 24 à 48 heures suivant l’intervention. Sur le plan biologique, 75 % des participants (IC à 95% ; 55–91 %) ont une guérison complète ou partielle de l’hyperaldostéronisme, et 43 % (24–61 %) montrent une normalisation ou une amélioration notable de la pression artérielle. Fait remarquable, chez quatre patients, la disparition de l’APA à l’imagerie s’est accompagnée de valeurs tensionnelles normales sans aucun traitement antihypertenseur.

    Une résolution complète de l’hyperaldostérolisme chez presqu'un tiers des patients

    L’ensemble des nodules hyperproducteurs identifiés par TEP-scanner ont pu ensuite être localisés par échoendoscopie et ciblés par le cathéter d’ablation. Les participants avaient par ailleurs une hétérogénéité de profils démographiques (16 étaient d’origine caucasienne, 11 afro-descendante et 1 asiatique), reflétant partiellement la diversité des patients hypertendus. Fait intéressant, l’ablation a dû être répétée (une deuxième séance) chez sept d’entre eux, sans majoration des risques post-opératoires. Par ailleurs, des opérateurs peu expérimentés en EUS-RFA ont pu réaliser la procédure, suggérant une faisabilité et un apprentissage raisonnables.

    Sur le plan de la tolérance, aucune crise hypertensive médullo-surrénalienne n’a été notée, et aucune lésion significative des organes adjacents (notamment l’estomac ou le pancréas) n’a été constatée. De plus, la capacité de l’imagerie moléculaire à repérer précisément les lésions de très petite taille (généralement de 1–2 cm) a permis de limiter l’étendue des « brûlures » successives, préservant ainsi le parenchyme surrénalien sain.

    Une étude de phase 1 « proof of concept »

    Les données proviennent d’une étude de faisabilité conduite dans trois centres au Royaume-Uni entre février 2018 et février 2023. Parmi 44 patients initialement évalués, 28 ont été retenus sur la base des critères de l’Endocrine Society pour l’hyperaldostéronisme primaire et de l’identification non invasive (PET-CT) ou invasive (AVS) d’un adénome producteur d’aldostérone à gauche. Après une biopsie à l’aiguille fine (19G) pour confirmer la nature de l’adénome, plusieurs séquences d’ablation (10 à 20 secondes chacune) étaient réalisées sous contrôle échographique direct. L’échantillon, bien que limité, a ciblé une population souffrant de différentes comorbidités, ce qui renforce la pertinence clinique des résultats. Néanmoins, comme toute étude de phase 1, son but premier était la démonstration de la sécurité et de la faisabilité, plutôt qu’une évaluation exhaustive de l’efficacité comparative.

    Selon les auteurs, ces résultats suggèrent que l’EUS-RFA, couplée à l’imagerie moléculaire, pourrait constituer une alternative moins invasive que l’adrenalectomie totale pour les adénomes producteurs d’aldostérone du côté gauche, limitant les inconforts liés à l’AVS et à la chirurgie. L’absence de complications majeures rapportées, conjuguée à un taux non négligeable de rémissions cliniques et biochimiques, encourage à lancer des essais comparatifs de plus grande envergure. En ce sens, une étude randomisée contre la chirurgie est déjà en cours de conception, avec l’espoir de valider définitivement la place de l’EUS-RFA dans la prise en charge de l’hyperaldostéronisme primaire unilatéral et, à plus long terme, d’affiner les indications d’une ablation sélective des nodules surrénaliens.

     

    Pour laisser un commentaire, Connectez-vous par ici.
    
    -----