Addictologie

Cannabis à l'adolescence : pas d’augmentation du risque de psychose

Chez les adolescents qui commencent à consommer du cannabis, une vulnérabilité partagée et un effet d'automédication expliqueraient l'association entre la consommation de cannabis et les symptômes psychotiques. Il n'y aurait pas de preuve que le cannabis augmente directement ces symptômes après son initiation. Une prise en charge précoce des symptômes psychotiques pourrait prévenir l'initiation du cannabis et réduire les risques associés.

  • diego_cervo/istock
  • 07 Nov 2024
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    La consommation de cannabis chez les adolescents est depuis longtemps associée à un risque accru de développer des troubles psychotiques. Cependant, la nature de cette association reste débattue. Cette étude s'est penchée sur trois hypothèses principales pour expliquer ce lien : l'hypothèse du risque contributif (le cannabis augmente le risque de psychose), l'hypothèse de la vulnérabilité partagée (des facteurs communs prédisposent à la fois à la consommation de cannabis et aux symptômes psychotiques) et l'hypothèse de l'automédication (les adolescents consomment du cannabis pour soulager leur détresse liée aux symptômes psychotiques).

    Publiée dans The JAMA Psychiatry, cette analyse de l’étude ABCD, une étude longitudinale mise en place en 2016 sur plus de 11 000 adolescents, montre que les adolescents qui ont consommé du cannabis avaient au préalable un plus grand nombre de symptômes psychotiques et une détresse accrue, soutenant les hypothèses de vulnérabilité partagée et d'automédication. Aucune augmentation significative des symptômes psychotiques n'a été observée après l'initiation du cannabis, ce qui ne soutient pas l'hypothèse du risque contributif.

    Pas d’aggravation des signes psychotiques après l’initiation du cannabis

    Dans cette étude portant sur 11 858 participants âgés de 9 à 10 ans au départ, les adolescents ayant consommé du cannabis à un moment donné ont rapporté 0,86 symptôme psychotique de plus (IC à 95 % : 0,68 à 1,04) et une augmentation de 1,17 point de détresse associée aux symptômes (IC à 95 % : 0,96 à 1,39) par rapport à ceux n'ayant jamais consommé (NS). De plus, une augmentation progressive du nombre de symptômes psychotiques (B = 0,16 ; IC à 95 % : 0,12 à 0,20) et de la détresse associée (B = 0,23 ; IC à 95 % : 0,21 à 0,26) a été observée dans la période précédant l'initiation du cannabis, soutenant l'hypothèse de l'automédication.

    Ces associations sont restées significatives après ajustement pour les symptômes internalisés et externalisés, suggérant une relation spécifique entre le cannabis et les symptômes psychotiques. En revanche, aucune augmentation significative des symptômes n'a été observée après l'initiation du cannabis, ce qui ne corrobore pas l'hypothèse du risque contributif. Les analyses ont également montré que ces résultats étaient spécifiques au cannabis et n'étaient pas observés avec l'initiation d'autres substances comme l'alcool ou la nicotine.

    Une très large étude longitudinale

    Les données proviennent de l'étude ABCD (Adolescent Brain Cognitive Development), une vaste cohorte longitudinale américaine qui suit plus de 11 000 adolescents sur une période de 4 ans, avec cinq vagues de collecte de données. Les participants ont été recrutés dans 21 sites de recherche aux États-Unis, assurant une bonne représentativité de la population générale. L'âge moyen des participants au départ était de 9,5 ans. L'étude a utilisé des modèles de croissance discontinus pour analyser les trajectoires des symptômes psychotiques avant et après l'initiation du cannabis. Cette méthodologie permet de distinguer les effets antérieurs et postérieurs à l'initiation, renforçant la validité interne des conclusions.

    Les résultats soulignent l'importance de considérer les facteurs de vulnérabilité partagée et les comportements d'automédication dans les modèles théoriques et les interventions cliniques. Ils suggèrent également que la prévention de la consommation de cannabis chez les adolescents devrait cibler ceux présentant déjà des symptômes psychotiques ou une détresse associée.

     

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