Pour des raisons économiques
DMLA : des généralistes pressent Hollande d'autoriser l'Avastin
Les médecins généralistes enjoignent au Président d'obtenir une RTU pour l'Avastin dans le traitement de la DMLA. Ce médicament est 30 fois moins coûteux que le traitement actuel, le Lucentis.
Les médecins généralistes veulent absolument pouvoir prescrire de l'Avastin dans le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Pour y être autorisé, le syndicat de la médecine générale (SMG) a décidé d’adresser une lettre ouverte au président de la République. Il réclame un déblocage de la situation.
En mars 2014, Le Parisien indiquait que la ministre de la Santé, Marisol Touraine, avait soumis au Conseil d’Etat un projet de décret concernant l’anticancéreux l'Avastin (Roche). Ce médicament devait être bientôt ouvert au traitement de la DMLA, une maladie de l'œil qui résulte d'une détérioration graduelle de la macula, petite zone située au centre de la rétine qui permet de voir avec précision les détails et les couleurs. Une option plus qu'intéressante pour le système de santé français car ce produit offre une solution alternative et économique au Lucentis (Novartis), seule spécialité autorisée pour le moment dans cette pathologie. Si le traitement officiel coûte 900€ par injection, son « concurrent » n’en demande que 30€. En proposant ce décret, la ministre de la Santé forçait en fait la main au laboratoire suisse Roche. Ce dernier n'a en effet pas demandé l'autorisation dela prescription de l’Avastin dans le traitement de la DMLA depuis 2012.
Les autorités sanitaires complices ?
Face à cette situation ubuesque, le syndicat de la médecine générale accuse directement les plus hautes autorités sanitaires de complicité avec les laboratoires. Dans leur lettre ils confient : « Maîtriser les dépenses de santé ne peut reposer sur les seuls soignants : faut-il encore que l’Administration y mette du sien, que les politiques jouent leur rôle d’aiguillon. Or, qu’avons-nous constaté sur des exemples récents, significatifs et hautement symboliques ? Un pillage à grande échelle, aussi éhonté qu’organisé – nous pesons nos mots – de la Sécurité sociale, par certains groupes, bénéficiant, hélas, de la passivité, si ce n’est de la complicité agissante des plus hautes autorités sanitaires de ce pays. »
Une attitude d'autant plus choquante que la France connaît aujourd'hui un déficit record de la branche santé de l'Assurance maladie. De plus, la situation ne serait pas sur le point de s'améliorer. Mauvaise organisation des soins, coûts des progrès techniques, vieillissement de la population... D'ici 2040, le déficit de l'assurance maladie pourrait même atteindre la barre des 40 milliards d'euros, selon les experts du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM).
400 millions d'euros "gaspillés" tous les ans
« Dans les circonstances graves que vit la France, il paraît impensable de gaspiller en pure perte quelque 400 millions d’euros par an », explique le syndicat. Il réclame ainsi au chef de l’État d'user de son « autorité pour mettre fin aux manœuvres d’obstruction visant à retarder depuis plus d’un an la sortie du décret » autorisant les RTU (recommandations temporaires d’utilisation) pour motif économique. Résultat, le SMG souhaite sur le champ l’abrogation de la « circulaire du 11 juillet 2012 interdisant l’usage de l’Avastin comme substitut au Lucentis. » Cela afin de permettre au plus vite la prescription d’Avastin dans le traitement de la DMLA.
Une enquête pour soupcon d'entente illicite entre Rocher et Novartis
Enfin, parmi ses autres requêtes, le SMG demande la saisie de l’Autorité de la concurrence pour ouvrir une enquête « sur le soupçon d’entente illicite entre les groupes Roche et Novartis, en vue de bloquer la mise en marché de l’Avastin sous forme de préparation ophtalmologique. » SMG rappelle que l’Autorité italienne de la concurrence a déjà infligé aux deux groupes une amende record de 180 millions d’euros, sur le même dossier.
Pour rappel, Lucentis caracole donc en tête des médicaments les plus remboursés. Il est en effet le premier poste de dépenses de médicament de l'Assurance maladie avec 389 millions d’€ remboursés en 2012 par la Sécurité sociale et près de 500 millions en 2013.
L'intérêt d'obtenir cette RTU présente aussi un bénéfice majeur du côté des malades, en terme d'efficacité du produit mais surtout sur le plan financier. La DMLA concerne un millions de Français.