En grève depuis 100 jours
Les sages-femmes se heurtent à l'opposition de médecins
Des syndicats de médecins s'opposent à l'évolution du statut des sages-femmes vers plus d'autonomie. Elle pourrait selon eux, déstructurer les salles d'accouchement, et mettre en danger les patientes.
Demain jeudi, les sages-femmes seront officiellement en grève depuis 100 jours. Dans cette bataille qu'elles ont engagé pour leur autonomie avec le ministère de la Santé, ces professionnelles réclament notamment l'accès au statut de praticien hospitalier (PH). En effet, même si elles exercent une profession médicale, elles ont depuis toujours le statut de « paramédicale ». Mais, à la veille d'une nouvelle réunion au ministère sur leur statut, les sages-femmes du Collectif (1) viennent de subir un revers. Plusieurs syndicats de médecins se sont opposés aujourd'hui de façon officielle à l'autonomisation des sages-femmes.
Le risque de déstructurer les salles d'accouchement
Dans deux communiqués distincts, des médecins hospitaliers et un syndicat de gynécologues obstétriciens alertent sur les conséquences négatives de la possible évolution du statut des sages-femmes. Pour eux, aller vers davantage d'autonomie pour les sages-femmes risque de « déstructurer » les salles d'accouchement et de mettre en danger les patientes.
Par ailleurs, même s'ils reconnaissent que le « déficit de reconnaissance des sages-femmes doit être entendu », ces praticiens hospitaliers souhaitent que ce dossier soit cloturé rapidement, « car ce mouvement génère notamment dans les salles d'accouchement des tensions délétères pour l'ensemble des professions qui les côtoient, et à terme pour les femmes », écrivent cinq intersyndicales de praticiens hospitaliers (SNAM-HP, INPH, CPH, CMH, Avenir Hospitalier).
Les accouchements, toujours à risque
En outre, ces derniers rappellent que l'équilibre actuel de l'accouchement est centré sur « le pluri-professionnel et la complémentarité. » Ils soulignent d'ailleurs à ce titre qu'« un accouchement dit physiologique devient rapidement à risque, et c'est le rassemblement d'équipes soudées autour de protocoles partagés qui permet de maintenir la sécurité des parturientes. »
Autre argument avancé, mais plus surprenant, les intersyndicales de praticiens hospitaliers mettent également en garde l'ensemble des sages-femmes et les pouvoirs publics sur l'aventurisme qui consisterait pour elles à sortir de la fonction publique hospitalière, pour se diriger vers un statut de praticien hospitalier : temps de travail mal réglementé, conditions de retraite dramatiques, soumission croissante à la hiérarchie hospitalière, etc.
Un 2ème syndicat de gynécologues s'oppose à cette autonomie
Enfin, après le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) qui s'opposaient en décembre aux sages-femmes comme « premiers recours » lors d'une grossesse, c'est à présent le Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (Syngof) qui entend alerter les pouvoirs publics sur les conséquences des dérapages dans la pratique de certaines sages-femmes.
Pour ces gynécologues, « l'autonomisation des sages-femmes, porté par le climat d'effervescence actuel, ne peut se faire au péril des patientes. C'est pourtant le cas si les sages-femmes dévient vers le suivi gynécologique au-delà de la physiologie à laquelle se limitent leurs compétences. »
Et ces derniers de rappeler que dans « différentes régions remontent des accidents, par exemple après pose inadéquate de stérilet, non diagnostiquée par les sages-femmes". L'information sur les compétences des sages-femmes ne doit pas laisser croire qu'elles peuvent en toute sécurité, assurer le suivi gynécologique au même titre que les docteurs en médecine », concluent-ils.
Malgré ces attaques, les sages-femmes avertissaient hier, en indiquant qu'elles « sont toujours aussi déterminées »
(1) ONSSF, CNSF, CTFC santé sociaux, Association nationale des sages-femmes, Cnema, SNECMA, Anesf