Etude chez la souris
Une piste pour prévenir les dégâts des irradiations
Des chercheurs sont parvenus à éviter la destruction spontanée des cellules en prévention d’une irradiation. Des souris irradiées avaient la même espérance de vie que des animaux non exposés.
- L'approche pourrait servir en prévention des radiothérapies (Rex Features/REX/SIPA)
Survivre à des doses élevées de radiation, c’est possible. Des chercheurs de l’Ecole de médecine de Stanford (Californie, Etats-Unis) sont parvenus, en modifiant des voies moléculaires dans les intestins, à améliorer la résistance de l’organisme à une irradiation. Les résultats sont parus ce 14 mai dans la revue Science Translational Medicine.
Des souris traitées en amont
Au départ de cette étude, les chercheurs étudiaient la réaction des molécules lorsque les cellules sont sous-oxygénées. Ils ont noté que les protéines HIF réagissaient en se multipliant dans cette situation de stress. Elles repoussent les pathogènes et assurent un échange sain des fluides. Mais en situation normale, elles disparaissent rapidement de l’organisme. « Nous nous sommes donc demandé si stabiliser les protéines HIF, et donc accroître leurs niveaux dans les cellules, pourrait protéger les intestins des effets d’une radiation », explique le Pr Amato Giaccia, principal auteur de l’étude. Car les radiations tuent les cellules en endommageant leur ADN. Dans ce cas, les niveaux de protéine HIF diminuent fortement.
L’équipe a donc tenté de bloquer la dégradation des protéines de deux manières chez la souris. Le premier groupe a intégré des souris génétiquement modifiées, de manière à exprimer trois protéines qui protègent la protéine HIF. Le second a traité des souris naturelles à l’aide d’une molécule qui exprime le même groupe de protéine. « Nous avons été très surpris par la forte protection que reçoivent les animaux », souligne le Pr Giaccia. « Il est important de noter que nous n’avons pas réduit les dommages aux cellules intestinales provoqués par l’irradiation ; nous avons simplement modifié la physiologie de ce tissu, et la façon dont il répond à ces dommages. »
« Une espérance de vie similaire »
Les résultats des tests sont frappants. Des souris non traités et non modifiées ne survivaient pas plus de 10 jours à une irradiation. 70% des souris génétiquement modifiées résistaient au moins un mois après avoir reçu une dose létale de radiations abdominales et 27% à une irradiation totale. Du côté des souris traitées avant irradiation, 67% survivaient à 60 jours pour une exposition partielle, 40% à un mois pour une exposition totale.
Dans l’ensemble des cas, les niveaux des protéines HIF1 et HIF2 ont augmenté fortement. Les souris survivantes présentaient aussi de moindres taux de mort cellulaire, et leur glande accueillant les cellules souches réparant l’intestin résistait mieux. « Les animaux qui ont survécu aux radiations abdominales ont une espérance de vie similaire à celle des animaux non exposés », s’enthousiasme le Pr Giaccia.
Selon les chercheurs, la technique est partiellement effective jusqu’à 24 heures après l’exposition. Mais il reste une limite, selon le propre aveu des chercheurs : « Nous avons pris conscience qu’il était impossible de pré-traiter les humains exposés par accident à de grosses radiations comme à Tchernobyl ou Fukushima parce que ces expositions sont – par nature – imprévisibles », estime le Pr Giaccia. En revanche, ils n’excluent pas d’utiliser ce traitement sur des patients cancéreux avant une radiothérapie, ou auprès d’intervenants sur des sites où une catastrophe nucléaire a eu lieu.