Oncologie
Dépistages organisés des cancers : l'IGAS juge les résultats très décevants
Participation faible et inégalités d'accès, les programmes de dépistage organisés des cancers sont bien loin de remplir leurs objectifs selon l'Inspection générale des finances. Une réorganisation s'impose et les centres régionaux de coordination des dépistages du cancer sont dans la ligne de mire.
- gorodenkoff/istock
« Des résultats en deçà des attendus notamment en termes de participation et d'atteinte des publics, au regard des moyens alloués et des objectifs nationaux fixés ». C'est ce à quoi conclut un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) concernant l'évaluation des programmes de dépistage organisés du cancer du sein, de l'utérus et colo-rectal. Cette mission demandée par le ministère de la santé visait à évaluer la capacité des dispositifs en place pour faire face aux enjeux portés par la stratégie décennale de lutte contre le cancer.
Pour un coût estimé à 600 millions d'euros, les résultats sont bien décevants pour la mission IGAS avec des taux de participation bien en deçà des objectifs européens et des écarts territoriaux importants. Dans le viseur de l'IGAS, les récents centres régionaux de coordination des dépistages des cancers (CRCDC) qui ont de grandes difficultés à remplir leurs missions. En outre, l'IGAS appelle à une réorganisation profonde du pilotage et de l'organisation des dépistages et à des investissements massifs pour développer le numérique et la gestion des données.
Mauvaise note pour les Centres régionaux de coordination des dépistages des cancers
Créés il y a 3 ans, le bilan n'est pas positif pour les CRCDC. Ces centres régionaux sont chargés de huit missions dont l'invitation des populations au dépistage, la veille de la qualité du dispositif, l'évaluation des programmes ou encore la sensibilisation du grand public et des professionnels. Mais ils peinent à les assumer selon le rapport IGAS. Les causes sont multiples.
Parmi elles, le rapport souligne un manque d'effectifs et de compétences dans les équipes ou encore la régionalisation qui a contraint à de nombreuses réorganisations internes mettant au second plan la réalisation des objectifs des centres. La mission pointe aussi l'absence de révision, pourtant nécessaire et ayant déjà fait l'objet de discussion, des programmes de dépistage sur plusieurs points structurants. Tout d'abord le transfert des invitations au dépistage à la CNAM et non plus aux CRCDC, une activité actuellement très chronophage pour les centres alors qu'ils ont selon le rapport « une valeur ajoutée très limitée sur [cette] mission ».
Autre point critique, l'absence de mise en place de la dématérialisation des mammographies pour la seconde lecture. En effet, le maintien des clichés mobilise une part très importante de personnel des centres, et engendre un surcoût annuel de 10 millions d'euros souligne le rapport. L'IGAS insiste aussi sur la nécessité de la mise en œuvre d'un système d'information national et déplore de trop maigres ressources consacrées aux démarches « d'aller vers » , pourtant nécessaire vue l'insuffisante participation des Français aux trois dépistages.
Réorganisation des missions des centres de coordination et investissements dans le numérique sont nécessaires
L'IGAS souligne malgré les critiques le « rôle indispensable et difficilement substituable dans plusieurs domaines » des CRCDC et n'appelle donc pas à leur suppression. Elle recommande par contre de réorienter les centres vers les missions pour lesquelles ils ont la plus forte valeur ajoutée, ce qui passera aussi par des investissements dans le numérique et la gestion des données.
Avec la fin préconisée de la gestion des invitations et la dématérialisation de la seconde lecture des mammographies, le CRCDC devrait se voir dégager du temps pour améliorer les actions « d'aller vers », de suivi, de prévention et de promotion du dépistage auprès des professionnels de santé. « Souvent intéressantes mais trop dispersées, inégales ou peu évaluées », ces actions doivent pour l'IGAS gagner en rigueur et en harmonisation. Dans ce domaine, elle préconise par exemple, des états des lieux du dépistage sur les territoires pour mieux fonder les actions auprès de la population ou un répertoire national d'actions probantes à destination de l’ensemble des partenaires pour éviter que chacun localement ne « réinvente des actions » souligne le rapport.
Traiter aussi le fond : actualisation des recommandations
Au-delà, de réorganiser le pilotage, l'IGAS insiste sur d'autres points cruciaux pour améliorer le dépistage. L'IGAS rappelle l'urgence d'actualiser les recommandations notamment sur la place de la tomosynthèse dans le dépistage du cancer du sein ou de l’auto prélèvement pour le dépistage du cancer de l'utérus.