Chirurgie orthopédique
Fracture du col et personne âgée : l’hémiarthroplastie cimentée a un avantage
Chez les personnes âgées de 60 ans ou plus, avec une fracture intracapsulaire de la hanche, une hémiarthroplastie cimentée permet d'améliorer la qualité de vie immédiate et de réduire le risque de fracture périprothétique, par rapport à une hémiarthroplastie non cimentée.
- edwardolive/istock
La majorité des personnes âgées chez qui survient une fracture du col du fémur a une déficience physique ou cognitive. Environ la moitié des fractures de la hanche se produisent au niveau du col du fémur, et la majorité de ces fractures sont traitées par une prothèse partielle de la hanche (hémiarthroplastie) dans laquelle la tête du fémur est remplacée par un implant métallique. L’hémiarthroplastie est donc considérée comme le traitement le plus adapté chez ces patients âgés mais on ne sait pas s’il faut utiliser du ciment ou pas pour la fixation de cette prothèse.
En 2019 aux Etats-Unis, 55% des personnes âgés avec une fracture du col du fémur ont reçu une hémiarthroplastie non cimentée, même si cela va plutôt à l’encontre des recommandations des sociétés savantes et alors que l'utilisation de ciment semble être la meilleure technique dans les méta-analyses chez ces patients âgés fragiles. Le large essai randomisé WHiTE 5, sur plus de 1200 patients âgés de 60 ans et plus, avec fracture de hanche, montre avec un bon niveau de preuve qu’une hémiarthroplastie cimentée procure une meilleure qualité de vie et moins de fractures périprothétiques qu’une hémiarthroplastie non cimentée. L’étude est publiée dans le New England Journal of Medicine.
Meilleure qualité de vie précoce et moins de complications
Le score de qualité de vie EQ-5D moyen, critère principal de l’étude, est de 0,371 chez les patients du groupe prothèse avec ciment et de 0,315 chez ceux du groupe prothèse sans ciment (différence ajustée, 0,055 ; IC à 95%, 0,009 à 0,101 ; p=0,02). La différence entre les groupes à 1 mois est similaire à celle à 4 mois, mais la différence à 12 mois est plus faible que celle à 4 mois.
La mortalité à 12 mois est de 23,9% dans le groupe prothèse avec ciment et de 27,8% dans le groupe prothèse sans ciment (OR pour le décès, 0,80 ; IC 95%, 0,62 à 1,05).
Des fractures périprothétiques sont survenues chez 0,5% et 2,1% des patients respectivement (OR non cimenté vs cimenté = 4,37 ; IC à 95 %, 1,19 à 24,00). Les incidences des autres complications sont similaires dans les deux groupes.
Intérêt et risques du ciment
L'utilisation d'une hémiarthroplastie non cimentée réduit à la fois le temps passé en salle d'opération et le risque de syndrome d'implantation du ciment osseux, dans lequel l'augmentation de la pression intramédullaire au moment de l’injection de ciment provoque une embolisation, qui peut entraîner une hypotension et une désaturation en oxygène et des complications cardiovasculaires aiguës.
Cependant, cet avantage de l'hémiarthroplastie non cimentée peut avoir un prix. Les études et les méta-analyses montrent que l'hémiarthroplastie cimentée serait associée à un risque plus faible de fractures périprothétiques et de réopérations qu’une hémiarthroplastie moderne non cimentée.
Large essai multicentrique et randomisé
L'essai WHiTE 5 est un essai multicentrique et randomisé, comparant une hémiarthroplastie cimentée à une hémiarthroplastie non cimentée chez des patients âgés de 60 ans ou plus avec une fracture intracapsulaire de la hanche.
Le critère principal est la qualité de vie liée à la santé, mesurée à l'aide des scores d'utilité du questionnaire EQ-5D (EuroQol Group 5-Dimension), 4 mois après la randomisation.
Les critères secondaires étaient la qualité de vie liée à la santé (score d'utilité EQ-5D) à 1 mois et 12 mois ; la mortalité à 12 mois ; les complications ; le statut de mobilité à 1 mois, 4 mois et 12 mois sur une échelle ordinale allant de « mobilité libre sans aide » à « aucune mobilité fonctionnelle (en utilisant les membres inférieurs) » ; et le statut résidentiel à la sortie de l'hôpital sur une échelle ordinale allant de « domicile personnel ou logement protégé » à « hôpital de soins aigus ».
L’utilisation du ciment est mieux pour une reprise précoce de la marche
Chez les adultes de 60 ans ou plus avec une fracture intracapsulaire de la hanche, l'hémiarthroplastie cimentée apporte une qualité de vie modestement mais significativement meilleure à 4 mois, par rapport à une hémiarthroplastie non cimentée. Les fractures périprothétiques sont plus fréquentes dans le groupe non cimenté que dans le groupe cimenté (2,1% contre 0,5%). Cependant, leur incidence globale est inférieure à celle rapportée dans d'autres essais randomisés et contrôlés d'implants modernes non cimentés, qui avaient montré des incidences de 5,5 à 15%.
Les méta-analyses des études portant sur la première génération d'implants non cimentés avaient montré des résultats inférieurs à ceux obtenus avec des implants cimentés, en particulier en ce qui concerne la douleur postopératoire (attribuée à l'absence de revêtement de surface des premiers modèles non cimentés). L'hémiarthroplastie non cimentée moderne à revêtement d'hydroxyapatite permet une meilleure intégration à l'os du patient, et les méta-analyses ont montré des taux de décès similaires (mais des taux plus élevés de fracture périprothétique) par rapport à l'hémiarthroplastie cimentée contemporaine.
Cependant, ces méta-analyses s’étaient concentrées sur la mortalité et les complications chirurgicales et non sur la qualité de vie. Dans l’essai WHiTE 5, les prothèses cimentées ressortent meilleures du point de vue de la qualité de vie à 1 et 4 mois, même si cette différence s’atténue ensuite. La reprise la plus rapide possible de la marche sans douleur est essentielle à court terme chez ces patients fragile et ce bénéfice n’est donc pas anodin ?