Pneumologie
De l'acide hyaluronique pour prévenir le remodelage bronchique ?
Le remodelage de l’épithélium bronchique altère la clairance mucociliaire des patients atteints de mucoviscidose. Des recherches in vitro sur le rôle positif de l’acide hyaluronique de bas poids moléculaire dans la réduction de ce remodelage apportent des résultats très encourageants. D’après un entretien avec Christelle CORAUX.

Une étude, dont les résultats sont parus en janvier 2024, dans l’European Respiratory Open Research, a cherché à démontrer l’efficacité de l’acide hyaluronique de bas poids moléculaire sur le remodelage de l’épithélium bronchique des patients atteints de mucoviscidose et son impact sur la clairance mucociliaire. Les auteurs de ce travail ont donc réalisé une culture interface air-liquide de cellules épithéliales bronchiques humaines de patients atteints de mucoviscidose et de patients non atteints, puis ils ont examiné l’influence de l’acide hyaluronique de bas poids moléculaire sur la régénération et le remodelage de l’épithélium bronchique, ce qui pourrait améliorer la clairance mucociliaire, caractéristique de la mucoviscidose, et qui est un élément important de la progression de la maladie, en affectant les mécanismes de défense et donc en favorisant les infections respiratoires chroniques.
Quid du phénomène de remodelage
Le docteur Christelle CORAUX, de l’INSERM du Centre Hospitalier Universitaire de Reims, spécialisée dans la recherche sur la plasticité de l'épithélium respiratoire dans les conditions normales et pathologiques, et auteure de ce travail, explique que l’épithélium bronchique des patients atteints de mucoviscidose est largement décrit dans la littérature de puis quelques années. Elle précise que cet épithélium est remodelé avec notamment une hyperplasie des cellules sécrétoires et basales, des zones de desquamation et un déficit en cellules ciliées. Ce remodelage altère considérablement la clairance mucociliaire. Christelle CORAUX précise que différents modèles ont été étudiés : des modèles murins in vivo, et des modèles in vitro avec des cellules d’épithélium bronchique issues de patients atteints de mucoviscidose ou non. Ces modèles ont déjà montré que les cellules épithéliales des patients atteints de mucoviscidose reconstituaient un épithélium remodelé, avec un déficit en cellules ciliées, mais sans hyperplasie des cellules sécrétoires. Elle explique que l’hyperplasie des cellules basales est liée au phénotype inflammatoire, que l’hyperplasie des cellules sécrétoires est liée à l’inflammation locale ou à l’infection alors que le déficit en cellules ciliées n’est associé à aucun de ces phénomènes. Il est donc licite de chercher comment limiter ce remodelage pour améliorer la clairance mucociliaire.
Intérêt des propriétés de l’acide hyaluronique de bas poids moléculaire
Christelle CORAUX rappelle qu’il a déjà été démontré que l’aide hyaluronique de bas poids moléculaire améliore la clairance mucociliaire in vitro. Lorsque l’on traite les cultures cellulaires des patients atteints de mucoviscidose avec de l’acide hyaluronique de bas poids moléculaire, on améliore la différenciation des cellules ciliées, on diminue l’hypertrophie basale, on réduit la hauteur de l’épithélium et on diminue l’hyperplasie des cellules sécrétoires. Elle précise donc que l’acide hyaluronique de bas poids moléculaires aurait un effet anti-inflammatoire, tout au moins pour le remodelage de l’épithélium bronchique, ce qui est très encourageant car, jusque là l’acide hyaluronique de bas pois moléculaire était décrit comme délétère, alors qu’il a la propriété, in vitro, de diminuer la sécrétion de mucus et de restaurer la ciliogénèse tant chez les patients atteints de mucoviscidose que chez les patients atteints de BPCO. Christelle COURAUX souligne, qu’à la suite de ce travail, deux brevets ont été déposés : l’un sur l’effet antiinflammatoire de l’acide hyaluronique de bas poids moléculaire au cours de la mucoviscidose et de la BPCO et l’autre sur l’impact positif de l’acide hyaluronique sur la différenciation des cellules ciliées au cours de la mucoviscidose et de la BPCO.
En conclusion, les recherches in vitro sur les cellules des patients sont poursuivies pour déterminer les mécanismes d’action de l’acide hyaluronique, ainsi qu’in vivo sur des modèles murins précliniques, avec des essais d’aérosolisation. Les résultats in vitro sont à l’heure actuelle enthousiasmants et l’aboutissement in vivo, pour les patients, est largement attendu.