Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité

Publié le 19.10.2016
Mise à jour 19.07.2022
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Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité
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La fièvre chez l’adulte est une élévation de la température du corps au-delà de 38°C et s’accompagne souvent de signes dus à la maladie qui la provoque. C'est une réaction normale de l'organisme pour l'aider à lutter contre une infection.

Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité : COMPRENDRE

Des mots pour les maux
Un « fébricule » est une petite fièvre.
Une « fièvre aiguë » évolue depuis moins d’une semaine.
Une « fièvre prolongée » ou « persistante » évolue depuis plus de 3 semaines.
Dans une « fièvre récidivante » ou « récurrente », les épisodes fébriles surviennent de façon répétée, espacés d’intervalles libres sans fièvre (allant de quelques jours à plusieurs mois).

Qu'est-ce que la fièvre chez l’adulte ?

La fièvre n’est pas une maladie en soi, mais un signe clinique témoignant d’une réaction de l’organisme, le plus souvent à une infection.
La température normale du corps est voisine de 37°C. Un adulte a de la fièvre si sa température rectale dépasse 38°C, lorsqu'elle est prise chez une personne normalement couverte, non exposée à une atmosphère chaude et au repos depuis 2 heures avant la prise de température. Après l’ovulation, la température corporelle de la femme augmente en règle générale d’environ 0°5 C.
La fièvre n’est pas seulement un signe d’alerte mais l’augmentation de la température du corps est le premier mécanisme de réponse à une agression virale. Les virus sont gênés par la chaleur : en réaction à une infection virale, un centre de contrôle de la température, situé dans le cerveau, déclenche une augmentation de la température du corps : la chaleur est produite par les cellules qui sont de véritables centrales chimiques.
Une fièvre est dite « aiguë » lorsqu’elle évolue depuis mois d’une semaine. Au-delà de 3 semaines, on parle de « fièvre prolongée ».
La fièvre pose plusieurs problèmes : son origine, sa tolérance et sa prise en charge. Si dans l'immense majorité des cas elle n’est que l’un des signes d’une maladie infectieuse bénigne (le plus souvent virale), elle peut aussi être le signe d’alarme d’une maladie plus sévère ou rapidement évolutive qu’il est impératif de prendre en charge en urgence.
Chez la personne âgée, il faut faire attention à une déshydratation en raison de l’augmentation des pertes d’eau.

Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité : CAUSES

A quoi est due la fièvre aiguë chez l’adulte ?

La fièvre est le plus souvent le signal qui indique que l'organisme se défend contre une infection virale, bactérienne ou parasitaire. Elle est fréquente dans beaucoup de maladies infectieuses banales (rhinopharyngite, bronchite, angine, otite aiguë...) et c’est même la première cause. Elle y est très utile car elle aide l’organisme à lutter contre les infections virales.
La fièvre aiguë peut avoir d’autres causes infectieuses :
• Infections virales gastro-intestinales (gastro-entérite), bénignes
• Infections virales graves (méningo-encéphalite, myocardite)
• Infections bactériennes des enveloppes du cerveau, les « méninges » (« méningite »), du poumon (« pneumonie » = 50 %), du système digestif (appendicite, cholécystite, colite = 25 %),du rein (« pyélonéphrite » = 5 %), de la peau (« érysipèle », « cellulite ») ou un abcès dentaire
• Infection parasitaire = paludisme (à évoquer devant toute fièvre au retour d’un voyage en pays tropical)
• Infection fongique : aspergillose, candidose invasive (à évoquer devant toute fièvre chez l’immunodéprimé)
• Infection généralisée avec bactéries dans le sang (« septicémie »)
• Infection d’une plaie après intervention chirurgicale, après traumatisme ou après une brûlure grave
La fièvre aiguë de l’adulte peut aussi avoir des causes non-infectieuses :
Coup de soleil
• Coup de chaleur ou insolation
• Déshydratation extrême
• Cause vasculaire : phlébite, thrombose veineuse profonde, embolie pulmonaire
Infarctus du myocarde
Maladies rhumatismales et maladies auto-immunes (lupus, Crohn, rectocolite, polyarthrite rhumatoïde…)
• Tumeurs malignes solides (syndrome paranéoplasique) et cancers du sang
Hyperthyroïdie
• Réaction à certains médicaments ou à un vaccin, comme celui de la fièvre jaune (syndrome post-vaccinal).
En cas de retour d’un voyage en pays d’endémie, il faut toujours évoquer un paludisme qui peut se révéler comme une simple gastroentérite fébrile.
La fièvre peut être d’origine indéterminée, sans infection, même après des explorations extensives.

A quoi est due la fièvre persistante sous antibiotique ?

Les causes peuvent être variables.
• Causes liées au traitement : défaut d’observance (en particulier en traitement à la maison = traitement « ambulatoire »), antibiothérapie non adaptée au germe (erreur de spectre) ou germe résistant ou de sensibilité diminuée à l’antibiotique, voie d’administration non adaptée au foyer (erreur d’administration avec mauvaise diffusion), dose insuffisante ou interaction médicamenteuse (inducteur enzymatique qui favorise la dégradation prématurée de l’antibiotique).
• Causes liées au foyer infectieux : foyer secondaire à distance ou foyer profond (abcès) ou non accessible (os, cerveau), porte d’entrée non-traitée ou infection associée sur cathéter ou sur chambre implantable pour les perfusions.
• Fièvre non-infectieuse : cause thromboembolique, allergie à un antibiotique, fièvre inflammatoire ou néoplasique.

A quoi est due la fièvre prolongée chez l’adulte ?

La fièvre chez l’adulteest considérée comme prolongée quand elle dure plus de 3 semaines : il doit s’agit d’une fièvre quotidienne, sans « intervalle libre », et différente des fièvres à répétition qui sont séparées par des périodes sans fièvres (« intervalles libres »).
• Les infections causent 25 à 40 % des fièvres persistantes :
- Infections bactériennes : endocardite, méningite décapitée, abcès profond (abcès dentaire…), infection urinaire sur malformation ou lithiase, tuberculose, pneumopathie atypique, maladie de Lyme, tuberculose, maladie des griffes du chat, typhoïde, brucellose, fièvre Q, rickettsiose, maladie de Whipple, syphilis
- Infections virales : Epstein-Barr virus, hépatite virale B, CMV, herpès virus, VIH
- Parasitoses : autochtone (toxoplasmose, leishmaniose viscérale du sud de la France) ou « d’importation », appelées parfois parasitoses « exotiques » (paludisme, Kala Azar, Larva migrans, amibiase hépatique…).
- Mycoses profondes : candidose sur cathéter, aspergillose ou cryptococcose chez la personne immunodéprimée…
• Les maladies inflammatoires et auto-immunes qui causeraient 10 % des fièvres prolongées : maladie de Horton (fièvre d’origine inflamma­toire la plus fréquente au-delà de 60 ans), lupus érythémateux disséminé (femme jeune), périartérite noueuse (arthromyalgies, multinévrite), maladie de Still (polynucléose, hyperferritinémie), maladie périodique (caractère familial), syndrome d’hyper-IgD, arthropathies microcristallines (goutte, chondro­calcinose) avec des atteintes le plus souvent polyarticulaires symptomatiques et une fièvre récidivante, maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI).
• Les tumeurs malignes solides (rein, ovaire, estomac, foie, pancréas, colon, thyroïde) ou hématologiques (lymphomes, leucémies) sont à l’origine de 10 à 20 % des fièvres prolongées.
• Viennent ensuite : les thromboses veineuses profondes (dont le myxome de l’oreillette), les fièvres de cause endocrinienne (hyperthyroïdie), les hématomes profonds (surtout en cas de traitement anticoagulant), les fièvres factices (« thermopathomimie » ou prise de température falsifiée, et syndrome de Münschhausen ou auto-injection de substances diverses).
• A part, les fièvres médicamenteuses (1 à 2 %), la fièvre survient en général entre 7 et 28 jours après l’introduction d’un nouveau traitement, mais peut survenir jusqu’à 6 mois après l’introduction du médicament. Tous les aspects de courbe thermique sont possibles, du fébricule à la « fièvre hectique », élevée, d’allure infectieuse. Une hyperéosinophilie n’est présente que dans 20 % des cas. Les médicaments principalement en cause sont les antibiotiques, les antiépileptiques, les anti-arythmiques... Il s’agit le plus souvent d’un diagnostic d’élimination et la normalisation de la courbe thermique après interruption du traitement suspecté confirme le diagnostic.
Il existe une forme particulière, le « DRESS syndrome » (Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms), particulièrement grave et imposant un diagnostic rapide pour interrompre le médicament en cause, sous peine d’une évolution possible vers la défaillance multiviscérale et le décès. Le DRESS syndrome régresse en général en plusieurs semaines après l’arrêt du médicament incriminé.
• Dans 15 à 30 % des cas selon les séries de la littérature, la fièvre reste inexpliquée même au terme d’une enquête exhaustive, avec altération possible de l’état général.

Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité : CONSULTATION

Comment bien prendre la température ?

La meilleure façon de mesurer la température est d’utiliser un thermomètre électronique par voie rectale (par l’anus) ou vaginale (par le vagin). L’utilisation d’un thermomètre électronique dans la bouche demande plus de temps et la température mesurée doit être corrigée, la bouche étant moins chaude que le corps (ajouter 0°5 C au chiffre mesuré).
Les thermomètres infrarouges à utiliser dans l’oreille sont rapides (une seconde) mais exigent une bonne technique pour bien viser le tympan avec l’appareil.
Les bandelettes à poser sur le front sont réservées à certaines circonstances.

Quand faut-il consulter en urgence en cas de fièvre aiguë ?

La fièvre aiguë justifie une consultation en urgence en cas de :
• Violents maux de tête avec raideur de nuque et vomissements.
• Petites tâches rouges apparaissant sur le corps (« purpura pétéchial »).
• Somnolence ou troubles du comportement.
• Fortes douleurs dans la poitrine ou dans le ventre.
• Fièvre au retour d’un pays tropical où sévit le paludisme (même si l’on prend une prophylaxie antipalustre).
• Fièvre persistante plus de 48 heures.
• Gène respiratoire.
• Douleurs urinaires.
• Immunodépression (greffe, VIH, corticoïdes…).
Comment faire le diagnostic des fièvres aiguës chez l’adulte ?
Dans le cadre d’une fièvre aiguë (survenue dans les 48 heures le plus souvent, en tout cas depuis moins de 5 jours), l’interrogatoire du médecin précisera :
• Le type de fièvre :
- Antécédents familiaux (maladie périodique) et personnels (cancer, immunodépression, malformations rénales, prothèses articulaires ou valvulaires, pratiques sexuelles…
- Circonstances d’apparition : antécédents de griffure de chat, notion d’infection familiale, voyage à l’étranger, état des vaccinations, prise de médicaments ou de drogues…
• Les signes d’accompagnement : ORL, respiratoires, digestifs, neurologiques, cutanés...
• D'éventuelles modifications du comportement : somnolence, agitation, troubles du comportements.
• Le ou les traitements déjà administrés : nature, posologie et voie, réponse au médicament antipyrétique, évolution de la fièvre.
Le médecin réalisera un examen clinique complet, avec un examen cutané et des muqueuses et la recherche d’une masse palpable, de gros ganglions et d’une grosse rate. La moindre piste conduira à des examens ciblés, examens qui sinon seront plus larges.
Sans signe d’orientation, des examens complémentaires seront ensuite réalisés avec des examens de 1ère intention.

Examens biologiques

• Numération-Formule-Sanguine avec numération des plaquettes
• Ionogramme sanguin
• Calcémie
• Créatininémie
• Bilan hépatique
• Bandelette urinaire (sang, leucocytes, nitrites, protéinurie)
• Electrophorèse des protéines plasmatiques
• TSH
• CPK, LDH
• CRP

Examens bactériologiques (et autres microbes)
 

• Hémocultures répétées (en précisant qu’on demande des cultures prolongées sur milieux spéciaux en cas de suspicion d’endocardite)
• Sérologies : VIH, EBV, CMV, toxoplasmose

Examens d’imagerie

• Radiographie pulmonaire
• Panoramique dentaire
• Echographie abdominale (recherche de masse suspecte, d’adénopathies profondes)

 
En cas de négativité de ce premier bilan, il est possible d’élargir les recherches avec un bilan de 2ème intention.

Examens biologiques

• Dosages d’anticorps : anticorps anti-nucléaires et anti-ECT, ANCA

Examens bactériologiques (et autres microbes)
 

• Crachats ou tubages gastriques à la recherche de bacilles de Koch
• Sérologies selon l’interrogatoire (Legionella, Coxiella burnetii, Bartonella...)

Examens d’imagerie

• Echographie cardiaque
• Echodoppler veineux
• Scanner thoraco-abdomino-pelvien
• Discussion d’un PET-scan

Biopsies tissulaires

• Biopsie ostéo-médullaire avec myéloculture
• Biopsie d’artère temporale chez la personne de plus de 60 ans

La moindre piste conduira à la demande d’examens plus ciblés mais dans environ 10 % des cas la fièvre peut rester inexpliquée malgré un bilan exhaustif.

Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité : QUE FAIRE ?

Quels sont les critères de gravité d’une fièvre aiguë de l’adulte ?

Une fièvre aiguë doit être soupçonnée d’une évolution très défavorable devant les critères suivants :
Terrain : maladie chronique sous-jacente (risque de décompensation) ou immunodépression ou grossesse ou personne âgée.
Cause : endocardite infectieuse (souffle cardiaque), péritonite (contracture abdominale), syndrome méningé, en particulier en cas de purpura fulminans...
Retentissement : déshydratation : tachycardie, hypotension artérielle, soif, pli cutané, langue.
Troubles neurologiques : syndrome confusionnel avec désorientation, délire, troubles de la conscience, agitation, convulsions ou sepsis associé avec choc septique.
Une hospitalisation doit être réalisée en urgence.

Que faire en cas de fièvre aiguë chez un adulte ?

Sauf immunodépression, il n’est pas nécessaire de traiter une fièvre lorsqu’elle reste inférieure à 38°5 C.
• Il faut surveiller régulièrement la température et la noter, ainsi que l’heure de la mesure.
• Il faut aérer la pièce ou y placer un petit ventilateur pour brasser l’atmosphère s’il fait chaud. De nombreux logements sont surchauffés en hiver alors qu’une température de 19°C suffit.
• Il faut boire souvent, de préférence des tisanes légèrement sucrées, de l’eau minérale, des jus de fruits ou du bouillon.
• Il est possible d’alléger son alimentation si l’on n’a pas faim.

Quels médicaments contre la fièvre de l’adulte ?

Le traitement de la fièvre consiste avant tout à traiter sa cause.
Contre la fièvre, il est conseillé den’utiliser qu'un seul médicament (« antipyrétique ») : aucune étude scientifique ne prouve que l’alternance, ou l’association, de deux médicaments est plus efficace qu’un seul. Par ailleurs, soulager la fièvre par un médicament n’empêchera pas le médecin de faire son travail et de poser un diagnostic.
Chez l’adulte, quatre médicaments antipyrétiques peuvent être utilisés pour faire baisser la température en complément du traitement de la cause.
Le paracétamol est recommandé, à la dose de 3 à 4 grammes par jour, en trois à quatre prises.
Par exemple, un comprimé à 1 gramme toutes les six heures
Attention, certains médicaments contre les rhinopharyngites contiennent également du paracétamol et il faut adapter la dose totale, car un surdosage en paracétamol peut être toxique pour le foie.
• Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS) peuvent également être utilisés :
- Soit l’ibuprofène, à la dose de 200 mg à 400 mg, une à trois fois par jour, sans dépasser 1,2 g par jour
- Soit le kétoprofène, à la dose de 25 mg, une à trois fois par jour, sans dépasser 75 mg par jour.
- Soit l’aspirine, à la dose de 1 gramme, 3 à 4 fois par jour, sans dépasser 5 grammes
L’aspirine et les AINS sont agressifs pour l’estomac et ne doivent pas être utilisés en cas d’ulcère de l’estomac ou du duodénum. La posologie peut être adaptée en fonction du poids et de l’âge (fragilité du rein chez le sujet âgé).
Pendant la grossesse, le traitement de la fièvre repose exclusivement sur le paracétamol dont la sécurité a été amplement démontrée.
En cas de fièvre inexpliquée au terme d’une enquête exhaustive, et en cas d’altération de l’état général, il est possible d’utiliser un traitement empirique :
• Les antibiotiques et les antituberculeux ne sont prescrits qu’en cas d’arguments convaincants et après réalisation de prélèvements multiples, en général en milieu hospitalier.
• Les corticoïdes ne sont prescrits qu’en cas de « maladie de Horton » chez le sujet âgé ou en cas de forte suspicion de vascularite type « périartérite noueuse », parfois en association à un traitement antituberculeux.
• En cas de terrain familial et de suspicion de « maladie périodique » ou « fièvre familiale méditerranéenne », un traitement d’épreuve par la colchicine est légitime et constitue un bon test diagnostic.

Fièvre de l’adulte : rechercher les critères de gravité : PLUS D’INFOS

La fièvre de l’adulte en France

La fièvre est le plus souvent un signal qui indique que l'organisme se défend contre un événement particulier : infection, inflammation, vaccination...

Les liens de la fièvre

Le site de la Faculté de médecine de Grenoble
http://www-sante.ujf-grenoble.fr/SANTE/corpus/disciplines/malinf/malinf/203/lecon203.html

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