Étude
Cerveau : comment la mémoire à court terme fonctionne-t-elle ?
Comment le cerveau fait-il pour retenir une information ou une image qu'il vient de voir ? C'est ce qu'on appelle la mémoire de travail. Des chercheurs ont tenté de mieux comprendre son fonctionnement dans une nouvelle étude.
Entre le moment où vous lisez le mot de passe Wi-Fi sur le tableau d’un café et le moment où vous revenez à votre portable pour le saisir, vous devez le garder en tête un court instant. Si vous vous êtes déjà demandé comment votre cerveau fait cela, c’est grâce à ce qu’on l’appelle la mémoire de travail, que les chercheurs s'efforcent depuis des décennies d'expliquer.
Ce mardi 27 décembre, les neuroscientifiques de l'Institut Picower pour l'apprentissage et la mémoire, l'un des trois groupes d'études des neurosciences au MIT (Massachusetts Institute of Technology), ont publié un résumé de leurs recherches dans la revue PLOS Computational Biology. Ces travaux permettent de mieux comprendre le fonctionnement de la mémoire de travail.
2 théories concurrentes pour expliquer la mémoire de travail
Les chercheurs ont d’abord effectué des mesures de l'activité des cellules du cerveau chez un animal effectuant une tâche activant sa mémoire de travail. Une image apparaissait devant lui, avant de disparaître puis de réapparaître une seconde plus tard accompagnée d'une nouvelle image. Il devait regarder l'original pour gagner une petite récompense. Le moment clé est cette seconde intermédiaire, nommée “période de retard”, au cours de laquelle l'image doit être gardée en tête, ce qui active la mémoire de travail. À ce moment-là, l’activité neuronale augmente beaucoup lorsque le cerveau voit l'image la première fois, puis augmente à nouveau lors du test de mémoire.
Les neuroscientifiques ont ensuite comparé ces mesures avec des modèles informatiques de réseaux neuronaux représentant les deux grandes théories qui permettent d’expliquer le mécanisme de mémorisation d'une information à court terme. Les résultats ont fortement favorisé la théorie la plus récente selon laquelle un réseau de neurones stocke les informations en effectuant des changements de courte durée dans leurs synapses (la région de contact entre deux neurones où s’échangent les informations). Cela contredit l’autre grande théorie concurrente, plus ancienne, selon laquelle la mémoire est maintenue par des neurones restant actifs de manière persistante (comme un moteur au ralenti).
"La mémoire de travail est aussi complexe et dynamique que nos pensées"
Alors que les deux modèles permettaient de garder les informations en tête, seules les versions qui permettaient aux synapses de changer de manière transitoire les connexions (un processus appelé "plasticité synaptique à court terme") produisaient des modèles d'activité neuronale qui imitaient ce qui était réellement observé dans de vrais cerveaux quand la mémoire de travail était activée.
L'idée que les cellules cérébrales conservent leurs souvenirs en étant toujours "actives" est peut-être plus simple, a reconnu dans un communiqué l'auteur principal de l’étude, Earl K. Miller, mais elle ne représente pas ce qui se fait dans la nature fait et ne peut pas produire la même flexibilité sophistiquée du cerveau quand il fait travailler sa mémoire à court terme. "Si la mémoire de travail n'était qu'une activité soutenue, ce serait aussi simple qu'un interrupteur. Mais la mémoire de travail est aussi complexe et dynamique que nos pensées", souligne-t-il.