Chirurgie

Un patient autrichien amputé de la mauvaise jambe : comment les "erreurs de côté" peuvent encore se produire? 

Opérer le mauvais genou, testicule ou rein peut arriver dans la précipitation ou à cause d’une mauvaise communication. Bien que ce type d’erreurs chirurgicales soit rare, il continue de se produire. Pourtant ces incidents peuvent être évités grâce à quelques mesures et un outil simple.

  • Par Geneviève Andrianaly
  • kzenon/iStock
  • 02 Déc 2021
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    Une "erreur humaine". En Autriche, une chirurgienne a écopé, le 1er décembre, d’une amende de 2.700 euros, dont la moitié avec sursis, pour avoir amputé la mauvaise jambe d’un homme de 82 ans. La soignante s’était trompée et avait indiqué le membre à ne pas opérer avant l’intervention chirurgicale en mai dernier à Freistadt. Elle s’en est rendue compte deux jours après l’opération. Le juge du tribunal régional de Linz a reconnu la chirurgienne coupable de "blessure par négligence grave". Il a également accordé 5.000 euros de dommages et intérêts à la veuve du patient, décédé entre-temps. La prévenue a dénoncé une faille dans la chaîne de contrôle en bloc opératoire. La direction de la clinique a déclaré que "les causes et les circonstances de cette erreur médicale avaient été analysées avec précision".

    Une sous-estimation des erreurs de côté 

    Selon une étude espagnole, présentée au Congrès 2019 Euroanaesthesia, les erreurs dites "de côté" ne sont pas aussi rares que l’on ne pense. Les chercheurs de l'hôpital Universitario Fundación Alcorcón de Madrid, en Espagne, ont voulu déterminer leur fréquence, les raisons de leur survenue et les mécanismes de sécurité nécessaires pour les prévenir. Pour ce faire, ils ont analysé les incidents signalés dans le Spanish Safety Reporting System in Anaesthesia and Resuscitation (SENSAR), un système qui a récolté les données de 100 hôpitaux espagnols entre 2007 et 2018. 

    Dans l’ensemble, 81 erreurs de côté ont été rapportées en 11 ans, avec un nombre élevé de ces incidents durant des chirurgies orthopédiques et ophtalmologiques. D’après les résultats, 44 % de ces erreurs de côté étaient liées à la procédure chirurgicale et 56 % concernaient la technique d’anesthésie, plus précisément une anesthésie du mauvais côté du corps. "La dure réalité est qu'en raison de l'absence de rapports sur ce type d’incidents dans les bases de données, ces chiffres représentent probablement une sous-estimation de la réalité. Cependant, ces dernières années, la mise en œuvre du signalement des erreurs indésirables a permis l’adoption de mesures correctives pour réduire leur occurrence dans nos hôpitaux", a expliqué le docteur Daniel Arnal, auteur principal de l’étude.

    Un protocole de marquage pour éviter les erreurs de côté 

    Les chercheurs ont révélé les origines de ces erreurs de côté et des défaillances systémiques. Dans deux tiers des cas, la check-list chirurgicale, à savoir un document qui permet de vérifier avant toute opération des critères essentiels, est mal ou pas utilisée. Autres causes : la précipitation et une mauvaise communication au sein de l'équipe médicale. 

    « Bien que ces événements indésirables graves soient extrêmement rares, notre mission devrait être de les réduire à zéro », a déclaré le Dr Daniel Arnal. Pour éviter que les erreurs de côté se produisent, les scientifiques ont souligné la nécessité de la mise en œuvre d’un protocole normalisé de marquage du site chirurgical et de la révision minutieuse des antécédents cliniques et des tests d’imagerie. Ils ont également rappelé l’importance de l’implication des patients pour leur propre sécurité, d’une formation adéquate et de l'utilisation appropriée de la check-list chirurgicale. En France, selon la Haute Autorité de Santé  (HAS), une utilisation correcte de la check-list a conduit à une diminution des complications post-opératoires de près de 30%.

    Les voies de recours pour les victimes d’une erreur de côté 

    Ce qui n'empêche pas que dans notre pays 60 000 à 95 000 événements indésirables graves surviendraient chaque année, toujours d’après la Haute Autorité de Santé. En cas d’erreurs de côté, les victimes peuvent entreprendre une transaction amiable auprès du professionnel ou de l’établissement de santé en cause dans l’accident médical. "Il est également possible de procéder à la saisine de la Commission Régionale de Conciliation et d’Indemnisation (CRCI). Chargé de se prononcer sur l’éventuelle indemnisation des victimes d’erreurs médicales, ce dispositif gratuit et indépendant ne nécessite pas l’assistance d’un avocat", peut-on lire sur le site de l’association France Assos Santé. 

    Si l’erreur chirurgicale implique un professionnel de santé libéral ou un établissement de santé privé, le litige doit être jugé par le tribunal de grande instance. Le tribunal administratif se charge, quant à lui, de juger les erreurs médicales subies dans un établissement public de santé ou par l’intermédiaire d’un professionnel exerçant en tant que salarié d’un établissement public. "Dans les deux cas, pour espérer une indemnisation, la victime doit apporter une expertise médicale dont les frais sont à sa charge et le recours à un avocat est obligatoire", précise l’association.

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