Nutrition

Obésité et risque de cancer : le régime méditerranéen le réduit indépendamment de l’IMC

Chez plus de 450 000 participants de la cohorte EPIC, une forte adhésion au régime méditerranéen est associée à une légère réduction du risque de cancers liés à l’obésité. Cette protection ne semble pas médiée par l’indice de masse corporelle ou le rapport taille-hanches.

  • 26 Fév 2025
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    L’incidence du surpoids et de l’obésité a considérablement augmenté dans le Monde ces dernières décennies, atteignant près de 40 % chez l’adulte. Cet excès pondéral est reconnu comme un facteur de risque pour plusieurs cancers, notamment de l’endometre, de l’œsophage, du rein et du foie. Parallèlement, le régime méditerranéen (MedDiet), riche en fruits, légumes, céréales complètes, huile d’olive et poisson, s’est imposé comme un modèle protecteur vis-à-vis de la prise de poids et de diverses maladies chroniques.

    Dans cette étude portant sur plus de 450 000 participants âgés de 35 à 70 ans à l’inclusion (cohorte EPIC), l’adhérence au MedDiet a été quantifiée par un score allant de 0 à 9, catégorisé en faible (0-3), moyen (4-6) ou élevé (7-9). Pendant un suivi médian de près de 15 ans, 4,9 % des personnes inclues ont développé un cancer associé à l’obésité (Obesity-Related Cancer, ORC).

    Selon les résultats publiés dans JAMA Network Open, les taux d’incidence annualisés de ces cancers associés à l'obésité sont passés de 0,053 à 0,043 par personne-année entre les classes « faible » et « élevée » d’adhésion au MedDiet. Après ajustements (tabac, facteurs démographiques, etc.), un score MedDiet élevé est associé à une diminution modeste, mais significative, de 6 % du risque de ces cancers (HR = 0,94 ; IC 95 % : 0,90-0,98).

    Baisse du risque de cancers colorectaux, hépatiques, rénaux et œsophagiens

    Les analyses secondaires et par sous-groupes confirment une tendance globale à la baisse du risque de cancers colorectaux, hépatiques, rénaux et, dans une moindre mesure, œsophagiens chez les personnes à adhérence médiane ou élevée au MedDiet. Chez les fumeurs, l’association protectrice semble plus marquée, suggérant que ce régime pourrait partiellement contrecarrer l’influence du tabac sur le risque tumoral. En revanche, l’évaluation du rôle médiateur de l’adiposité n’a pas mis en évidence d’impact significatif de l’IMC (indice de masse corporelle) ou du rapport taille-hanches dans la survenue de ces cancers.

    Bien que le MedDiet soit souvent lié à une réduction de l’obésité abdominale, cette étude ne retrouve pas de preuve formelle d’une médiation par ces paramètres morphologiques. Du point de vue de la tolérance ou des effets secondaires, il n’y a pas de notion négative associée à une alimentation de type méditerranéen ; au contraire, le régime reste réputé pour ses bienfaits métaboliques associé (amélioration du profil inflammatoire, meilleure régulation glycémique, etc.).

    La vaste cohorte prospective multicentrique européenne EPIC

    Sur le plan méthodologique, les auteurs ont tiré parti d’une vaste cohorte prospective multicentrique (EPIC), répartie dans plusieurs pays européens (23 centres). Les habitudes alimentaires de chaque participant ont été évaluées à l’inclusion via des questionnaires validés et spécifiques de chaque pays, permettant de calculer un score MedDiet standardisé. Le recours à un grand échantillon et un suivi prolongé confère une solidité statistique et une certaine généralisabilité des conclusions, d’autant plus que le MedDiet est représenté de manière hétérogène dans les différentes populations incluses (méditerranéennes ou non). Néanmoins, seule la mesure initiale des paramètres a été considérée ; les éventuels changements alimentaires ou anthropométriques en cours de suivi ne sont pas pris en compte. De plus, l’hétérogénéité même de la “diète méditerranéenne” à travers l’Europe peut atténuer la précision des estimations.

    Selon les auteurs, ces données renforcent l’idée d’une association bénéfique, quoique modeste, entre le régime méditerranéen et la réduction du risque de cancers liés à l’obésité. Bien que l’adiposité ne semble pas jouer un rôle intermédiaire décisif dans ce lien, un suivi nutritionnel adapté peut toujours contribuer à limiter la prise de poids et à soutenir d’autres mécanismes protecteurs (effet anti-inflammatoire, réduction du stress oxydatif, etc.).

    Les médecins peuvent donc encourager une alimentation inspirée du MedDiet, particulièrement chez les patients présentant d’autres facteurs de risque (tabagisme, antécédents familiaux...). Les perspectives de recherche incluent l’exploration d’autres voies de médiation possibles (microbiote, composés bioactifs) et l’examen longitudinal de l’évolution du régime alimentaire, afin d’éclaircir les mécanismes précis sous-jacents à la réduction du risque tumoral.

     

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    JDF

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