Asthme et dépression : une association à ne pas négliger

La dépression associée à l'asthme a un lien avec le mauvais contrôle nécessitant détection et prise en charge. Inversement, l’asthme mal contrôlé peut provoquer des symptômes anxio-dépressifs. Le dépistage de la dépression chez les asthmatiques doit faire partie de la prise en charge globale de ces patients. D’après un entretien avec Gilles GARCIA.

Une étude, dont les résultats sont parus en décembre 2024 dans le Journal of Asthma and Allergy, a cherché à faite le point sur le lien qui existe ente l’asthme et le syndrome anxiodépressif. Il s’agit d’une étude chinoise pour laquelle les auteurs ont réalisé une revue systématique de la littérature. Pour cela, ils ont effectué une recherche dans la base de données WoSCC (Web of Science Core Collection) de tous les articles publiés sur l’asthme et la dépression entre 2000 et 2023. Ils ont, ainsi,  pu inclure 3067 articles, provenant de 937 revues, impliquant 14 631 auteurs et 4006 centres dans 106 pays. Les principaux mots-clés de recherche étaient : qualité de vie, asthme infantile, soins primaires, substance P, intervention, émotion. Des thèmes émergents ont également été identifiés comme l’asthme sévère, maladies respiratoires chroniques et stress oxydatif.

Des publications sur le sujet en constante augmentation

Le professeur Gilles GARCIA, pneumologue à l’Hôpital Privé d’Antony et  président de l’association Asthme & Allergies, explique que les publications sur le sujet de la dépression associée à l’asthme sont en constante augmentation puisqu’en 2000 on en retrouvait moins de 50 par an et, qu’aujourd’hui, on peut en lire jusqu’à 10 000  par an, que ce soit sur l’asthme, la dépression ou l’association des deux. Pour Gilles GARCIA, il s’agit d’une thématique très importante car ces deux pathologies ont une très forte prévalence. Il souligne que dans les 3000 publications retenues le verbatim revêt une importance significative avec des termes comme isolement, qualité de vie, asthme de l’enfance, soins primaires, émotion et intervention, ou encore substance P (facteur neurobiologique). Gilles GARCIA précise qu’il est important de reconnaitre la dépression et son impact sur l’asthme  qui, en tant que maladie respiratoire chronique, provoque des frustrations sociales et physiques qui aggravent le syndrome dépressif. Le syndrome anxio-dépressif est une comorbidité fréquente de l’asthme, d’autan plus que l’asthme est sévère. De plus,  le syndrome dépressif a un retentissement sur le contrôle  de l’asthme, ce qui induit une boucle négative.

Un sujet non  prioritaire dans les publications françaises

Gilles GARCIA relève que ce travail a inclus des publications américaines, britanniques, australiennes, européennes  et chinoises mais pas de publications française. Il semble qu’en France, on ne s’intéresse pas suffisamment au lien asthme/dépression. Les études américaines et britanniques ont une puissance augmentée par les réseaux existant dans ces deux pays. Il semble qu’en France, la question de la dépression chez les asthmatiques ne soit pas abordée comme une évidence et ne constitue pas un axe de publication prioritaire. L’abord psychologique et la quantification de la part émotionnelle de l’essoufflement devrait faire l’objet d’études de cohortes,  même , si à l’ère de la médecine chiffrée, les symptômes insidieux de la dépression peuvent être difficiles à quantifier. Pour Gilles GARCIA, la prise en charge des patients asthmatiques doit être multidisciplinaire et il est important de considérer la gêne quotidienne, la qualité du sommeil, la qualité de la vie professionnelle et le retentissement de l’asthme sur la vie quotidienne des patients, qui pour bon nombre d’entre eux déjà  connu une sensation de mort imminente.

En conclusion, il est nécessaire, en France, d’ouvrir une autre dimension sur le caractère envahissant de la maladie asthmatique sur l’état psychologique et son retentissement sur la vie sociale et professionnelle des patients. Des études de cohortes, réalisées par des centres experts, pourraient enrichir les connaissances sur le sujet.