Alimentation pauvre, activité physique faible...
Pourquoi l'obésité et le surpoids touchent 1 Français sur 2
Selon un sondage, 30 % des Français seraient en surpoids et 16 % d'entre eux obèses. Une alimentation trop chargée en sucres et en graisses, et l'activité physique trop faible expliquent ce phénomène.
Près d'un Français sur deux seraient en surpoids (30 %) ou obèses (16 %). C'est le constat fait par un récent sondage OpinionWay pour la Mutuelle générale de l'Education nationale dans lequel ont été interrogés plus de 2300 adultes sur leurs habitudes de vie. D'après ces résultats, les premiers touchés par l'obésité seraient les inactifs (20 %) et les 50-64 ans (21 %). A l'inverse, les jeunes semblent plus épargnés par ce fléau, avec seulement 9 % des Français de 18-24 ans déclarant être obèses. Face à ces chiffres, les experts s'inquiètent car l'obésité et le surpoids altèrent la qualité de vie. Ils provoquent en effet diverses maladies comme le diabète, l'hypertension ou les maladies cardiovasculaires. Eclairée par des experts, la rédaction de pourquoidocteur vous explique les origines d'une "épidémie" qui ne touche pas que les Etats-Unis.
Alimentation pauvre, activité physique faible
En France, ce bilan est presque aussi désastreux que celui des Etats-Unis. Le surpoids touche un tiers des adultes, l’obésité 15 % d’entre eux selon les données plus officielles de l'enquête ObEpi-Roche 2012. Il s'agit en plus d'une maladie profondément injuste puisque les chercheurs français constatent régulièrement que les inégalités socio-économiques atteignent aussi la lutte contre l’obésité. Et si le nombre d’obèses tend à se stabiliser dans le pays ces dernières années, le mal continue de progresser fortement chez les plus défavorisés, alors que les classes plus riches ou mieux éduquées, elles, voient le taux reculer légèrement.
En tenant compte du revenu des individus, de profondes disparités apparaissent. 8 % des adultes qui gagnent 3 800€ ou plus par mois sont obèses. Lorsque le salaire mensuel est inférieur à 1 200€, ce taux est trois fois plus élevé.
Pour expliquer ces chiffres, les habitudes de vie sont le plus souvent à blâmer en France. Alimentation peu variée – trop chargée en sucres et en graisses – et activité physique trop faible, tels sont les maux des classes défavorisées. Interrogé récemment par pourquoidocteur, le Dr Jean-Michel Borys, endocrinologue et responsable du programme EPODE (1), faisait la lumière sur les grandes disparités entre les catégories sociales.
Ecoutez le Dr Jean-Michel Borys, endocrinologue à Armentières (Nord) et responsable d'EPODE International Network : « Quand on analyse les différences entre les classes sociales, on se rend compte qu'elles portent sur l'alimentation, l'activité physique mais aussi le manque de sommeil. » (entretien réalisé le 15/01/14)
L’échec des politiques nationales
Par ailleurs, à cause du manque de structures sportives ou de parcs, les quartiers démunis ont plus de mal à lutter contre l’obésité. Le niveau culturel ne doit pas non plus être oublié rappelait ainsi le Dr Jean-Michel Borys : « Un polytechnicien au chômage aura a priori un comportement alimentaire plus sain qu'une personne à faible niveau d'éducation qui gagne au Loto. » Ce n’est pourtant pas faute de tenter de changer les habitudes. En 2001, le Programme National Nutrition Santé (PNNS) est lancé. Il veut faire reculer l’obésité à coups de conseils alimentaires et de promotion de l’activité physique. La méthode est efficace, mais n’atteint pas sa première cible : les milieux défavorisés.
L'espoir des initiatives locales visiblement plus efficaces
Alors, faudrait-il aller chercher la solution du côté des campagnes locales d’éducation alimentaire ou sportive qui rencontrent quant à elles bien plus de succès. En 2008, à Fleurbaix et Laventie (Nord), une étude d’intervention est menée par le Dr Borys. Elle applique le programme EPODE, en proposant une éducation alimentaire aux enfants via l’école, puis via la communauté. Dans les deux villes, l’obésité a fortement diminué, y compris dans les classes défavorisées. Lorsque l’expérience s’achève, le taux d’obèses est presque deux fois moins élevé dans cette catégorie que la moyenne nationale (15,2% versus 26,9%). La ville est clairement l’espace à privilégier en matière de lutte contre l’obésité selon le Dr Jean-Michel Borys.
Ecoutez le Dr Jean-Michel Borys, endocrinologue : « C’est au niveau de la ville qu’on a le plus d’impact direct sur les habitudes de vie : sur l’offre d’activité physique, sur l’alimentation des enfants. » (entretien réalisé le 15/01/14)
Et le point fort de ces mesures est le suivant : elles ne ciblent pas l’obésité, mais ses facteurs (alimentation, activité physique). La ville de New York rencontre, elle, le même succès en combattant la malbouffe. Là-bas, l’obésité a reculé dans les quartiers pauvres sous le mandat du précédent maire, le milliardaire Michael Bloomberg. La ville de Strasbourg (Bas-Rhin) choisit pour sa part d’innover : elle opte pour le « sport sur ordonnance » pour les patients obèses, diabétiques ou malades du cancer.
En un an, ce sont plus de 300 personnes, diabétiques ou obèses qui se sont vus prescrire du sport pour leurs médecins. Un succès incontestable puisque plus de la moitié des patients qui ont bénéficié de ce dispostif venaient de quartiers défavorisés, et pas moins de 70% ne savaient ni nager, ni faire du vélo.
(1) EPODE (Ensemble Prévenons l’Obésité Des Enfants) : Initiative de prévention de l’obésité infantile à l’échelle d’une ville. Ce programme, mis en place depuis 2004, éduque les enfants à manger plus varié et à pratiquer plus d’activité physique. Il a notamment été expérimenté à Fleurbaix et Laventie. Il s’intitule aujourd’huiVIF (Vivons en Forme) et concerne 250 communes.