Etude de l'Inserm
Le diesel accusé de perturber le fonctionnement du foie
D’après une étude française, les particules fines du diesel sont toxiques pour les poumons, mais aussi pour les cellules du foie. Plusieurs conséquences cliniques sont envisagées.
Quelques jours après les pics de pollution aux particules fines qui ont touché la capitale, cette étude devrait conforter les détracteurs des moteurs diesel. Des chercheurs viennent en effet de publier dans Plos One des travaux qui montrent que les particules dégagées par la fumée diesel affectent la fonction hépatique.
Des travaux menés « in vitro »
Les chercheurs français (1) à l’origine de cette découverte ont travaillé in vitro, sur des cellules de foie (hépatocytes) en culture. Ils les ont exposées à un extrait de particules de diesel, à des doses équivalentes à celles inhalées par un individu vivant dans un milieu pollué. Les scientifiques ont ensuite mesuré le niveau d’expression et l’activité de plusieurs transporteurs présents à la surface des cellules.
Ces transporteurs hépatiques assurent le passage de molécules circulant dans le sang vers l’intérieur du foie. La bile conduit ensuite à l’élimination de ces substances. L’ensemble du système permet à l’organisme de se débarrasser des déchets naturels produits par nos cellules, ou la dégradation de médicaments par exemple.
Ici, les auteurs ont constaté que les particules de diesel réduisent l’expression de gènes codant pour ces transporteurs et bloquent l’activité de plusieurs d’entre eux. Et le phénomène s’observe « lorsque les cellules sont exposées à de faibles doses de particules », souligne le communiqué de presse de l'Inserm.
Toxique pour le foie
L’équipe rennaise de l'Inserm a constaté une forte inhibition des transporteurs MRP2 et OATPs impliqués dans l’élimination hépatique de nombreux toxiques et médicaments, mais aussi dans celle d’hormones stéroïdes sexuelles et d’hormones thyroïdiennes. Le blocage de l’activité des transporteurs de type MRP pourrait également perturber les circuits de régulation du glutathion, une molécule anti-oxydante endogène importante.
De possibles perturbateurs endocriniens
Résultat, même s’il s’agit pour le moment de travaux menés in vitro, le spectre des conséquences cliniques envisagées par les auteurs est large : « perturbations endocriniennes, perturbation de l’élimination de médicaments et de métabolites endogènes, ou encore excès de stress oxydatif lié à une mauvaise élimination des radicaux libres, pouvant contribuer au développement de maladies chroniques. »
Olivier Fardel, coauteur de ces travaux à l’Institut de recherche sur la santé, l’environnement et le travail, confie : « Cela aurait notamment pour effet de renforcer les effets cancérigènes du diesel favorisés par le stress oxydatif ».
Les prochains travaux sur la cancérogénèse
Pour cette raison, le chercheur souhaite poursuivre ses travaux pour étudier plus précisément les transporteurs présents au niveau des cellules pulmonaires (dont certains sont semblables à ceux retrouvés sur les hépatocytes), en s’intéressant notamment aux transporteurs associés à la cancérogénèse.
Deux millions de véhicules à moteur diesel de plus de 15 ans seraient encore en circulation en France, selon le ministère de l'Écologie. Les particules fines qu'ils émettent ont été reconnues comme « cancérogènes certains » par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
(1) Unité Inserm 1085, Institut de recherche en santé, environnement et travail, Rennes