Plasma thérapeutique
Don de sang : l’EFS perd son monopole
Les salariés de l’Etablissement Français du Sang sont en grève pour dénoncer l’arrêt obligatoire de la fabrication de plasma thérapeutique. Ils craignent aussi de perdre le monopole de la collecte.
Le sang attire bien des convoitises. En grève, les salariés de l’Etablissement Français du Sang (ESF) en font l’amère expérience. Dans un marché mondial estimé à douze milliards d’euros, le statut du seul et unique fournisseur de sang en France semble quelque peu compromis.
Le plasma thérapeutique, fabriqué par des groupes privés
De fait, le modèle hégémonique de l’ESF a déjà perdu en vitesse - raison pour laquelle les salariés manifestent ce mardi. En juillet 2014, le Conseil d’Etat a porté un coup de massue à l’établissement en mettant fin à son droit exclusif de fabriquer et de commercialiser du plasma thérapeutique. Dès le 1er février, l’EFS devra donc abandonner cette partie de son activité, pour la céder à des entreprises privées, et notamment au groupe suisse Octapharma.
Le laboratoire helvétique est à l’origine de la procédure qui a mis fin au monopole. En effet, l’EFS était, jusqu’ici, la seule structure autorisée à produire du plasma SD en France. Le plasma correspond à la partie liquide du sang, qui contient des protéines d'un intérêt thérapeutique majeur. Pour inactiver les virus potentiellement présents, l’établissement utilise un solvant-détergent (SD). Selon le Conseil d’Etat, ce procédé constitue une technique industrielle qui fait du plasma un médicament à part entière.
Résultat : l’ESF, qui n’a pas le statut d’établissement pharmaceutique, perd le droit de produire le plasma SD. Pour la structure publique, cela signifie la destruction de plusieurs dizaines d’emplois.
Un rapport qui suscitent des craintes
Un autre point inquiète davantage les salariés de l’EFS. Un rapport de l’IGAS sur la filière plasma, commandé par le Ministère de la Santé, émet des recommandations qui n’augurent rien de bon pour l’établissement. Selon les syndicats CGT, CFDT, CFE-CGC et FO, ses auteurs proposent en effet de casser le monopole de la collecte et de permettre à une autre structure publique de prélever le plasma des donneurs.
Ainsi, le Laboratoire français de fractionnement et des biotechnologies (LFB), qui commercialise des médicaments à base de sang, pourrait lui aussi obtenir le droit de collecte. Selon l’IGAS, une telle ouverture du monopole devrait lui permettre de gonfler ses stocks, puisque le LFB ne peut se fournir en plasma qu’auprès de l’ESF.
« Qu’en est-il des principes sécuritaires, instaurés à la suite de l’affaire du sang contaminé, de séparer le collecteur du fractionneur ? », s’interrogent les syndicats dans un communiqué. De fait, la séparation des deux organismes a été décidée en 1993 pour éviter toute conflit d’intérêt.
« Nous ne comprenons pas de telles décisions, si ce n’est une volonté de limiter considérablement le monopole et le rôle de l’EFS, en favorisant les lobbies pharmaceutiques », dénoncent encore les syndicats, qui craignent, à terme, de voir disparaître le modèle français du don de sang, fondé sur la gratuité.