Bulletin épidémiologique hebdomadaire
VIH : plus de 5 millions de dépistages en 2013
Un nombre en hausse de dépistage, toujours plus de dépistages positifs… mais toujours autant de séropositifs qui s’ignorent. Le bilan concernant le dépistage du VIH est en demi-teinte.
- Le dépistage rapide du VIH aide à sortir les personnes à risque de l'isolement (PATRICE MAGNIEN/20 MINUTES/SIPA)
Laboratoire d’analyse médicale, centre de dépistage anonyme et gratuit (CDAG), structures communautaires, autotest… Les moyens pour se faire dépister du VIH ne manquent pas. On dépiste d’ailleurs de plus en plus, selon le dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de l’Institut de Veille Sanitaire (InVS). Mais les populations qui choisissent de vérifier leur statut sérologique sont souvent les mêmes.
56 500 tests rapides à orientation diagnostique
En 2013, les laboratoires d’analyse médicale ont réalisé 5,2 millions de sérologies VIH. Les CDAF en ont effectué 344 000. 56 500 tests rapides à orientation diagnostique (TROD), fournis par les associations, ont également été pratiqués.
Si l’on dépiste plus, c’est en partie grâce à l’arrivée des TROD sur le « marché » des tests disponibles. En plus d’être rapide, ils permettent aux associations d’approcher les personnes à risque en dehors du système de santé. C’était en tout cas l’objectif des organisateurs de l’opération Flash Test, qui s’est tenue dans diverses régions (Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Rhône-Alpes, Guyane) pendant une semaine. Les zones choisies font partie de celles où on dénombre le plus de dépistages positifs.
Source : BEH
Grâce à cette couverture croissante de la population, le nombre de tests positifs augmente (+ 7% entre 2011 et 2013). Selon François Bourdillon, directeur de l’InVS, cela suggère que « les propositions de dépistage seraient mieux ciblées, notamment grâce aux actions communautaires de TROD. » Même si le BEH révèle que la part des tests positifs est plus forte lorsqu’ils sont réalisés dans les CDAG.
30 % de séropositifs s’ignorent Chaque année, 7 000 à 8 000 nouvelles contaminations par le VIH sont documentées. « Malgré de nombreux efforts de prévention et de promotion du dépistage, le nombre de personnes ignorant leur séropositivité ne se réduit pas », déplore François Bourdillon, directeur de l’InVS dans l’éditorial de ce BEH. Autre problème majeur : 30 % des personnes qui découvrent leur séropositivité ont déjà un niveau immunitaire faible. Et pour cause : une infection par le VIH reste asymptomatique pendant 10 ans. |
Le succès limité de Flash Test
Par ailleurs, le public touché par l’opération Flash Test « ne diffère pas vraiment de celui qui est dépisté dans le cadre d’actions communautaires organisées régulièrement, contrairement à ce qui était attendu et recherché », reconnaît François Bourdillon dans son éditorial.
Le manque de diversité, c’est justement l’écueil principal du dépistage : les populations à risque à la marge sont souvent les mêmes. 27 % des personnes ayant eu recours à un TROD entre 2003 et 2013 étaient des migrants, 30 % des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), 5 % des usagers de drogues injectables et 2 % des prostitués. Côté Flash Test, on note « une proportion comparable de personnes d’origine étrangère, mais moins d’HSH et d’UDI (usagers de drogues injectables, ndlr) que dans les actions de dépistage communautaire réalisées en 2013 », selon un article du BEH consacré au bilan de l’opération Flash Test.
L’échec du dépistage généralisé
Le dépistage généralisé du VIH, prôné par la Haute Autorité de Santé (HAS) est loin de remporter le succès escompté : « Les nouvelles recommandations préconisent de proposer un test de dépistage à l’ensemble de la population âgée de 15 à 70 ans, hors notion d’exposition à un risque de contamination ou caractéristique particulière », écrivait la HAS sur son site en 2010. « Sur ce point, le médecin généraliste a un rôle crucial à jouer. » Un rôle visiblement mal rempli : « la proposition de dépistage généralisé à la population générale (…) n’a pas été largement appliquée, comme le montre la faible augmentation de l’activité de dépistage en 2011 et sa stabilité au cours des deux années suivantes », épingle le BEH. Un groupe d’experts a également souligné en 2013 le manque de mobilisation des professionnels. Sans compter que cette approche exclut d’emblée les populations à risque sorties du système de santé, comme les migrants en situation d’irrégularité.
Les actions communautaires aident à sortir certaines personnes de cette zone grise dans laquelle aucun dépistage n’est proposé, conclut le BEH. Mais même là, une limite s’impose rapidement, tout comme sa solution : « Conduire les HSH distants des modes de vie communautaires gays à suivre les recommandations implique une diversification des arguments d’incitation et des outils de dépistage, dans laquelle l’autotest peut constituer un levier. » Une affirmation valable pour les autres groupes à risque.