2 ans de prison et 30000 euros d'amende

Le procès de l'Yonne relance le débat sur la vaccination obligatoire

Parents de deux enfants de 3 ans et 15 mois, Samia et Marc sont convoqués devant la justice pour avoir refusé de les faire vacciner. Le débat sur l'intérêt de la vaccination obligatoire est relancé.

  • Par la rédaction
  • OJO Images / Rex Featur/REX/SIPA
  • 09 Oct 2014
  • A A

    Convoqués ce jeudi au Tribunal de grande instance d'Auxerre (Bourgogne), Marc et Samia Larère encourent deux ans de prison et 30 000 euros d'amende. Il leur est reproché d'avoir refusé de faire vacciner leurs enfants de 3 ans et 15 mois contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP). Sauf contre-indication médicale reconnue, cette vaccination est obligatoire (Code de la santé publique). Elle est, d'ailleurs, largement suivie dans le pays mais ce procès illustre un mouvement qui prend de l'ampleur sur l'intérêt de la vaccination obligatoire.

    L'intérêt en terme de santé publique
    Et l'enjeu est important. Car pour les familles il est indispensable d'apporter la preuve de ces vaccinations pour l'inscription des enfants en crèche, à l'école, en garderie, en colonie de vacances ou toute autre collectivité. Les parents qui refusent de faire vacciner leurs enfants sont donc facilement repérables. Et ils ne peuvent pas de ce fait scolariser leur enfant. 
    Face à ces parents qui boudent la vaccination, le Haut Conseil de Santé publique (HCSP) a reconnu récemment que le système de vaccination devait évoluer en France. Dans son dernier avis, il se positionne clairement en faveur des vaccins obligatoires, et estime qu’ils doivent être gratuits et plus nombreux.
    La vaccination est « l’action de santé publique la plus efficace », juge le HCSP en préambule de son avis. En chiffres, elle a en effet fourni des résultats indéniables : depuis 1989, la France n’a pas connu de cas autochtone de poliomyélite. Le tétanos, lui, n’a fait que 36 victimes entre 2008 et 2011.
    Une prise de position loin d'être isolée puisque « c’est aussi l’avis de 56 % de la population générale et 42 % des médecins », rajoutait le HCSP. Ce dernier souhaitait même élargir la liste des vaccins obligatoires et ajouter le ROR (Rougeole-Oreillons-Rubéole) aux vaccinations diphtérique, tétanique et poliomyélitique. 


    Crainte d'une chute de la couverture vaccinale 
    De plus, ces experts affirmaient aussi qu'un obstacle de taille s’oppose à la levée de l’obligation vaccinale. D'après le HCSP, deux enquêtes de l’Institut de Veille sanitaire (InVS) et de l’Institut de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) ont révélé qu’en cas de levée, 21 % de la population générale s’interrogerait sur le bien fondé de la vaccination.
    Côté médecins, 83 % des généralistes et 90 % des pédiatres insisteraient pour que les parents vaccinent… mais 15 et 9 % d’entre eux leur laisseraient la possibilité de ne pas vacciner. « La crainte d’une chute de la couverture vaccinale apparaît aujourd’hui comme la principale raison du maintien d’un régime d’obligation », concluait le HCSP.

     

    Le paradoxe de l’obligation vaccinale
    Par ailleurs, malgré ses bienfaits évidents, la vaccination obligatoire repose sur plusieurs paradoxes. Depuis 1964, aucune nouvelle obligation n’a été établie, alors même que certaines maladies à vaccination « recommandée » représentent « un fardeau comparable voire plus important que celui pour lesquelles la vaccination est obligatoire », observait le HCSP. Il cite en exemple l’hépatite B - avec 1 300 décès annuels par cirrhose ou cancer du foie - et le papillomavirus humain - qui cause chaque année 1 000 décès par cancer du col de l’utérus.

    Et l’existence même d’une catégorie « obligatoire » dévalorise celle qui est « recommandée »  : 53 % des personnes interrogées dans une étude menée en France estimaient que les vaccins recommandés sont moins importants que ceux obligatoires. Sans compter que les vaccins combinés associent dosages recommandés et obligatoires… ce qui complique encore la situation.

    Le mouvement anti-vaccin progresse en France
    Résultat, même s
    'il est difficilement quantifiable, le mouvement anti-vaccin est une réalité et progresse en France. Selon les chiffres d'IMS Health, une entreprise qui fournit des études aux acteurs de la santé, la période 2008-2012 a vu les ventes d'unités de vaccin chuter de 12 % toutes catégories confondues, y compris pédiatriques, et jusqu’à 40 % pour la rougeole. Et la défiance des Français à l'égard des vaccins ne cesserait de progresser. D'après un sondage BVA pour l’Assurance maladie, une personne sur cinq considère que le vaccin contre la grippe est plus dangereux que le mal lui-même.

    Pour rappel, en 2010, la couverture vaccinale nationale atteignant 98,5 % pour les trois doses de diphtérie, tétanos, polio (DTP) à deux ans. Et 91,3 % pour les quatre doses dans cette même tranche d'âge. Le vaccin contre la coqueluche, pourtant non obligatoire, affichait des taux quasi-similaires au même âge. 
    En revanche, les vaccins (non-obligatoires) "RRO" (rougeole, rubéole, oreillons) étaient délaissés par les parents. Avec un taux de seulement 89,2 % de cette vaccination chez les deux ans pour une dose. Pire encore, en 2010, ce taux chutait à  60,9 % pour les deux doses qui sont normalement recommandées par les autorités sanitaires françaises (Source : InVS, Mesure de la couverture vaccinale en France, novembre 2012).

     

    Pour laisser un commentaire, Connectez-vous par ici.
    
    -----