Hématologie
Lymphome Diffus à Grandes Cellules B réfractaire/en rechute : un traitement personnalisé prometteur
Grâce aux avancées dans la compréhension moléculaire du lymphome diffus à grandes cellules B, de nouvelles approches thérapeutiques, telles que le protocole ViPOR offrent des perspectives prometteuses pour les patients réfractaires ou en rechute. Ce protocole innovant, combinant 6 agents ciblés, marque une étape cruciale vers des traitements plus efficaces et personnalisés, améliorant ainsi significativement les chances de survie et la qualité de vie des patients.
- Dr_Microbe/istock
Le lymphome diffus à grandes cellules B (LDGCB) regroupe un spectre de tumeurs lymphoïdes agressives caractérisées par une grande hétérogénéité biologique et clinique. Bien que la majorité des patients atteints de LDGCB soient guéris grâce à une chimiothérapie de première ligne associée à une immunothérapie, environ 40 % rechutent.
Les thérapies CAR-T ciblant le CD19 en seconde ligne pour les maladies persistantes ou à rechute précoce ont amélioré les résultats, mais de nombreux patients atteints de maladies réfractaires succombent finalement au lymphome.
Compréhension moléculaire et médecine de précision
Les progrès dans la compréhension des caractéristiques moléculaires du LDGCB ont permis d'espérer que les approches de médecine de précision ciblant des voies biologiques définies pourraient améliorer de manière significative les résultats. Le profilage de l'expression génique a divisé le LDGCB en deux sous-types majeurs avec des implications pronostiques : les tumeurs de type B activées (ABC) et les tumeurs de type B du centre germinatif (GCB). Au sein du sous-type GCB, les lymphomes B de haut grade avec réarrangements MYC/BCL2 (HGBCL-DH-BCL2) représentent un sous-groupe associé à un pronostic défavorable.
Des essais cliniques au cours des deux dernières décennies ont tenté d'exploiter les vulnérabilités biologiques dans le sous-type ABC à haut risque, caractérisé par une signalisation accrue par les récepteurs B-cellules (BCR) actifs chroniquement, la voie NF-κB, et la régulation à la hausse de BCL2. Bien que de nombreux agents ciblés aient montré une activité contre le LDGCB de type ABC, leur effet clinique reste limité. L'échec des agents moléculaires à améliorer définitivement les résultats peut refléter une granularité supplémentaire des sous-types détectée par des analyses génétiques et de microenvironnement, ou indiquer que cibler une seule voie est insuffisant et que la combinaison d'agents ciblés pourrait améliorer l'efficacité.
Essai clinique ViPOR : une association innovante de traitements ciblés
Dans un essai de phase Ib-II, publié dans le New England Journal of Medicine, évaluant l'efficacité et la sécurité du protocole ViPOR, une association de cinq médicaments ciblés, dans le traitement du LDGCB récurrent ou réfractaire. Chaque agent cible des voies de survie distinctes du LDGCB : le vénétoclax, inhibiteur de BCL2, l'ibrutinib, inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton, la prednisone, qui cible les récepteurs glucocorticoïdes et les BCR, l'obinutuzumab, un anticorps monoclonal anti-CD20, et le lénalidomide, un agent immunomodulateur. Ces médicaments bloquent des voies critiques pour la survie des LDGCB de type ABC.
L'essai montre que le protocole ViPOR est efficace, avec 54 % des patients présentant une réponse et 38 % une réponse complète. Les réponses sont durables, avec 72 % des réponses complètes toujours en cours après un suivi médian de 40 mois. La survie sans progression à 2 ans est de 34 % pour l'ensemble de la cohorte et de 60 % lorsque ViPOR est administré en deuxième ligne, comparable aux résultats obtenus avec les thérapies CAR-T ciblant le CD19.
Toxicité et gestion des effets indésirables
Bien que ViPOR soit exempt d'agents chimiothérapeutiques conventionnels, il n'est pas exempt d'effets toxiques. Les événements toxiques hématologiques ont été fréquents, bien que seulement 5 % des patients aient souffert de neutropénie fébrile. Les événements indésirables non hématologiques les plus courants étaient la diarrhée, l'hypokaliémie, les nausées et les éruptions cutanées.
Un taux élevé d'hypokaliémie de grade 3 ou 4 suggère des effets toxiques synergiques induits par la combinaison des médicaments. Une réduction des doses et des retards dus à des événements indésirables ont été nécessaires chez 17 % et 25 % des patients, respectivement.
Place de ViPOR dans le traitement du LDGCB
D’après un éditorial lié, le protocole ViPOR représente une option attrayante comme traitement potentiellement sûr, efficace, accessible et sans chimiothérapie pour les patients atteints de LDGCB récidivant ou réfractaire, en particulier ceux ayant des sous-types à haut risque tels que le non-GCB et le HGBCL-DH-BCL2. Cependant, l'accès au traitement par CAR-T reste problématique pour de nombreux patients et prestataires, rendant les traitements comme ViPOR intéressants en termes d'administration et de coûts.
ViPOR exploite les vulnérabilités biologiques des sous-types ABC et HGBCL-DH-BCL2 associés à un pronostic défavorable. Toutefois, les essais futurs devraient se concentrer principalement sur les sous-types non-GCB et HGBCL-DH-BCL2, l'efficacité clinique étant limitée pour les patients avec des tumeurs GCB.
En tant que thérapie potentiellement sans chimiothérapie de première ligne pour les patients atteints de LDGCB non-GCB ou HGBCL-DH-BCL2, ViPOR pourrait offrir une alternative prometteuse, bien que des études supplémentaires soient nécessaires pour confirmer son efficacité et sa sécurité.
ViPOR représente une avancée majeure vers des traitements basés sur la biologie pour le LDGCB, offrant un espoir renouvelé pour les patients et les cliniciens face à cette maladie agressive.