Faits, peine encourue, avis des experts...

Procès Bonnemaison : ouverture de 2 semaines de débat sur la fin de vie

Le procès de l'ex-urgentiste, Nicolas Bonnemaison, s'est ouvert ce mercredi à Pau. Accusé de l'empoisonnement de sept personnes en fin de vie, il risque la réclusion criminelle à perpétuité.

  • Par Julien Prioux
  • Capture d'écran YouTube (Images BFMTV)
  • 11 Jun 2014
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    A cause du public et des caméras, il a eu du mal à se frayer un chemin jusqu'à la salle d'audience de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, à Pau. Normal, car le procès de l'ex-médecin urgentiste du CHU de Bayonne, Nicolas Bonnemaison, qui débute aujourd'hui est hors-norme. Accusé d'avoir empoisonné sept patients en fin de vie, l'audience va durer plus de deux semaines, et soixante dix témoins seront présents à la barre. Parmi eux, l'ancien ministre de la Santé, Bernard Kouchner, l'auteur de la loi sur la fin de vie, Jean Leonetti, ou encore des représentants de l'association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). pourquoidocteur vous détaille les enjeux de cette affaire judiciaire débutée il y a maintenant trois ans.

    Les faits
    Le médecin Nicolas Bonnemaison est poursuivi pour « empoisonnement sur personnes particulièrement vulnérables », cinq femmes et deux hommes en fin de vie hospitalisés dans une unité du service des urgences de l’hôpital de Bayonne où il travaillait. Ces personnes étaient décédées peu après leur admission, entre mars 2010 et juillet 2011, du fait des agissements de l'ex-urgentiste. Mais ce dernier est dénoncé peu de temps après, en août 2011 exactement, par des infirmières et une aide-soignante de son service. Radié par le Conseil de l’Ordre des médecins, il assume depuis le début ses actes, et explique avoir « fait preuve de compassion afin de préserver la dignité des patients. » Plusieurs familles de patients décédés le soutiennent d'ailleurs maintenant dans son combat judiciaire.

    La peine encourue aux yeux de la loi
    D’abord mis en examen pour les cas de quatre patients, le 12 août 2011, il a été mis en cause en janvier 2012 pour trois autres décès. A ce jour, aucune famille de victime n'a porté plainte. Et jusqu'à présent, seule deux d'entre elles se sont constituées partie civile, a annoncé le président de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantique ce matin.
    En droit, Nicolas Bonnemaison est accusé d’avoir administré à ces patients des médicaments hors du protocole de soins et sans recourir à l’avis d’autres médecins. Il aurait utilisé de l’Hypnovel, un puissant psychotrope, et au moins une fois du Norcuron, à base de curare, substance entraînant la paralysie des muscles respiratoires, utilisée en anesthésie-réanimation. Ainsi, la justice lui reproche d’avoir agi en dehors du cadre de la loi Leonetti sur la fin de vie. Celle-ci permet il est vrai au médecin d’administrer au patient une dose de soins palliatifs pouvant avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie. A la condition d’en avertir le patient ou sa famille, et en accord avec d’autres médecins. Or, dans certains cas, le Dr Bonnemaison aurait agi seul, sans avertir personne. En tout cas pas l'équipe médicale. Il encourt pour ces faits la réclusion criminelle à perpétuité.


    Nicolas Bonnemaison, Vincent Lambert : deux cas qui relancent le débat
    Le cas de Nicolas Bonnemaison divise les Français et le corps médical. En 2013, plus de 250 praticiens ont dénoncé dans une lettre ouvertre à François Hollande la radiation de l'urgentiste, et une pétition en sa faveur a recueilli 60 000 signatures. Dans le même temps, la chambre disciplinaire de l’Ordre des médecins d’Aquitaine lui a infligé le 24 janvier la plus sévère  des 5 sanctions prévues, la radiation. Ainsi, le Dr Bonnemaison ne peut plus exercer son métier en France. « Nous sommes profondément choqués par cette sentence », expliquait récemment à l’Agence France Presse l’un des signataires de cette lettre ouverte. « C’est un praticien qu’on connaît, il a travaillé 22 ans à l’hôpital », plaidait ce confrère. Mais au delà de son cas personnel, c'est le débat sur l'euthanasie et l'aide médicale à mourir qui devrait ressurgir. 
    D'autant plus que le 20 juin prochain, le Conseil d'Etat doit rendre sa décision concernant l'interruption des traitements de Vincent Lambert, un patient tétraplégique en état végétatif depuis plusieurs années dont la famille se déchire autour de la fin de vie. Une expertise indépendante a confirmé l'incurabilité de son état. La décision du Conseil d'Etat sera donc lue comme une interprétation restrictive ou non de la loi Leonetti. Mais avant de rendre sa décision, la juridiction administrative a souhaité consulter pour avis certains experts médicaux. Parmi eux, Jean Leonetti, l'Ordre des médecins, et le Comité Consultatif National d'Ethique. Seul avis rendu public, celui de l'Académie de médecine qui émettait une mise en garde sur la prise en charge des patients en état végétatif. Selon elle, soigner est la seule mission du médecin. 

    Une nouvelle loi sur la fin de vie pour bientôt ?
    Enfin, le gouvernement a annoncé encore récemment sa volonté d'aller plus loin que la loi actuelle sans préciser de calendrier. François Hollande avait déclaré en janvier 2014 qu'un projet de loi serait présenté dans les prochains mois. Mais depuis, plus rien. L'explication officielle, selon Le Monde, est que les consultations devaient être lancées une fois remis un rapport du Comité d'éthique, qui doit faire la synthèse des contributions rendues depuis deux ans par ses membres, la mission Sicard, les citoyens et les espaces éthiques régionaux.



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