Rhumatologie

Spondylarthrite axiale : le traitement précoce strict pour une rémission sans traitement

Une étude présentée au congrès de l’EULAR 2024 sur la spondylarthrite axiale montre qu’une approche combinant traitement ciblé et contrôle strict (« tight control ») permet d’atteindre des taux élevés de maladie inactive. Cependant, maintenir cette rémission sans traitement reste un défi, soulignant l'importance d'un diagnostic précoce et d'une gestion agressive.

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  • 15 Jun 2024
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    Le traitement précoce des rhumatismes inflammatoires a démontré un intérêt notable pour induire des rémissions sans traitement. L’European League Against Rheumatism (EULAR) recommande ainsi un traitement précoce pour les rhumatismes inflammatoires, car les traitements de fond synthétiques conventionnels (csDMARD) ont prouvé leur efficacité à ralentir la progression de la maladie dans la polyarthrite rhumatoïde et le rhumatisme psoriasique.

    Malgré ces réussites, les études visant à induire une rémission sans traitement dans la spondylarthrite axiale (axSpA) restent rares et difficiles à mener. Cette maladie se manifeste souvent par des douleurs lombaires inflammatoires d'apparition insidieuse, entraînant fréquemment un diagnostic tardif. Ce n’est que récemment qu’une définition consensuelle de la maladie précoce a été publiée, soulignant la nécessité d'une intervention rapide et ciblée.

    Traitement précoce, tight control et treat-to-target

    Lors du congrès EULAR 2024, une étude prospective évaluant l'efficacité d'une approche combinant « tight control » et « treat-to-target » avec un traitement ciblé chez des patients nouvellement diagnostiqués pour une spondylarthrite axiale, conformément aux recommandations de gestion de la maladie ASAS-EULAR, et non traités.

    Les patients ont été initialement traités avec deux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) à des doses optimales pendant au moins quatre semaines. En l'absence d'amélioration clinique significative, un traitement de monothérapie par golimumab a été instauré. Les patients ont été suivis jusqu'à l'obtention d'une rémission clinique durable, définie par un état de maladie inactive selon l'ASDAS-CRP lors de deux visites consécutives espacées d'au moins 12 semaines, ou jusqu'à la fin de l'étude.

    Après l'atteinte d'une rémission clinique durable, le traitement était arrêté et les participants suivis en pratique clinique courante pour évaluer la possibilité de maintenir une rémission sans traitement.

    Résultats prometteurs mais défis persistants

    Sur les 55 patients ayant complété l'essai, 61,8% ont atteint une rémission clinique durable, et 21,8% avaient une faible activité de la maladie à la semaine 52. Il s'agit du premier essai clinique dans la spondylarthrite axiale précoce où un état de maladie inactive durable a été atteint chez plus de 60% des patients.

    L'analyse univariée montrent que seuls le sexe et le score BASDAI de base étaient significativement différents entre ceux qui ont atteint une rémission durable et ceux qui ne l'ont pas atteinte. L'analyse multivariée montre que le sexe masculin, l'abstinence tabagique et un score BASDAI plus faible sont des prédicteurs de rémission.

    Parmi ceux qui ont atteint une rémission clinique durable et ont arrêté leur traitement, 84,8% ont connu une rechute de la maladie dans l'année suivant l'arrêt. Cette rechute s'est produite chez tous les patients ayant atteint un état de rémission grâce à un traitement par AINS, avec un délai médian de rechute de 61 jours. En revanche, dans le groupe traité par golimumab, le délai médian de rechute est de 155 jours, et 18,2% des patients sont restés en rémission sans traitement pendant plus de trois ans de suivi. Ainsi, bien que l'approche de traitement ciblé permette d'induire des taux élevés de maladie inactive dans la spondylarthrite axiale précoce, atteindre une rémission sans traitement reste un défi et semble réservé aux patients sous biothérapie.

    Perspectives futures et implications cliniques

    Les résultats de cette étude apportent des éléments précieux sur l'efficacité des interventions précoces et des approches tight control dans la spondylarthrite axiale. Toutefois, la rémission sans traitement demeure difficile à maintenir, notamment chez les patients traités seulement par AINS par rapport à ceux traités par anti-TNF. Ces résultats soulignent l'importance de poursuivre les recherches pour identifier les facteurs prédictifs de rémission durable, dont un état de moindre activité immunologique, et développer des stratégies thérapeutiques adaptées.

    Pour les cliniciens, ces données mettent en lumière l'importance d'un diagnostic précoce et d'une gestion agressive du traitement de la spondylarthrite axiale dès les premiers stades de la maladie. La compréhension des facteurs prédictifs de rémission peut aider à personnaliser les traitements et à améliorer les résultats à long terme pour les patients. L'utilisation d'approches de tight control, treat-to-target et de biothérapie doit être envisagée pour maximiser les chances de rémission, tout en étant conscient des défis inhérents au maintien de cette rémission sans recours à un traitement d’entretien ou même à un espacement des doses de biothérapies.

     

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