Hématologie
Myélofibrose : un nouvel inhibiteur de JAK sans aggravation de l’anémie
Le momelotinib, un inhibiteur de l'ACVR1/ALK2 et de JAK1/2, apporte une amélioration significative des symptômes sans aggraver les anémies chez les patients souffrant de myélofibrose.
- Shidlovski/istock
Les patients atteints de myélofibrose ont une amélioration cliniquement significative des symptômes liés à la maladie, notamment la splénomégalie, sans provoquer d'anémie lorsqu'ils sont traités par le momelotinib, un inhibiteur de l'ACVR1/ALK2 et de JAK1/2. Ce sont les résultats de l'essai international de phase III MOMENTUM, publiés dans The Lancet.
Ces résultats soutiennent l'utilisation du momelotinib par rapport au traitement standard danazol dans le traitement des patients atteints de myélofibrose qui étaient résistants, réfractaires ou intolérants au traitement de première ligne, en particulier les patients symptomatiques et ceux souffrant d'anémie.
Un essai versus danazol
L'essai MOMENTUM est la première étude randomisée de phase III à évaluer un inhibiteur de JAK1/2 et d'ACVR1/ALK2 chez des patients atteints de myélofibrose avec anémie. L'essai a été conçu pour comparer les avantages cliniques du momelotinib au danazol, un androgène de synthèse actuellement utilisé pour traiter l'anémie chez les patients atteints de myélofibrose symptomatique.
L'étude a recruté 195 patients adultes provenant de 107 sites de recherche, répartis dans 21 pays. Les participants à l'essai ont été répartis au hasard (2:1) pour recevoir le momelotinib (200 mg par voie orale une fois par jour) plus un placebo, ou le danazol (300 mg par voie orale deux fois par jour) plus un placebo, stratifiés selon le score total des symptômes (TSS ; <22 vs ≥22), la taille de la rate (<12 cm vs ≥12 cm), les unités de globules rouges ou de sang total transfusées dans les 8 semaines précédant la randomisation (0 unité vs 1-4 unités vs ≥5 unités), et le site de l'étude.
Réduction des symptômes et de l’anémie
Le critère d'évaluation principal de l'essai était la réduction des symptômes après 24 semaines de traitement, définie comme une réduction de 50% ou plus du score total des symptômes du Myelofibrosis Symptom Assessment Form. Une proportion significativement plus importante de patients ayant reçu le momelotinib ont des améliorations de leurs symptômes de la maladie (25%) par rapport à ceux ayant reçu le danazol (9%) (32 [25%] sur 130 vs six [9%] sur 65 ; différence de proportion de 16% [IC à 95% 6-26], p=0.0095).
Les patients traités par momelotinib ont également une réduction significative de la taille de leur rate, 25% d'entre eux ayant répondu après 24 semaines de traitement. De plus, ces patients ont eu besoin de moins de transfusions sanguines que ceux recevant le danazol.
Le profil de sécurité du momelotinib est comparable à celui des essais cliniques précédents. Les effets indésirables non hématologiques de grade 3 ou supérieur apparus au cours du traitement par le momelotinib et le danazol sont le plus souvent des lésions rénales aiguës (quatre [3 %] de 130 vs six [9 %] de 65) et une pneumonie (trois [2 %] vs six [9 %]).
Pas d’aggravation de l’anémie
La myélofibrose est une hémopathie myéloproliférative peu fréquente de la moelle osseuse qui se caractérise par un dérèglement de la signalisation JAK, à l’origine d’une perturbation de la production normale de cellules sanguines par l'organisme et qui entraîne des symptômes fréquents, notamment une augmentation du volume de la rate et une anémie. L'anémie chronique chez ces patients est associée à un mauvais pronostic.
Les inhibiteurs de JAK actuellement approuvés peuvent améliorer les splénomégalies et d'autres symptômes liés à la maladie, mais ils peuvent aussi aggraver l'anémie. Dans cet essai, le momelotinib, un inhibiteur de l'ACVR1/ALK2 et de JAK1/2, améliore l'anémie et réduit la dépendance aux transfusions chez les patients atteints de myélofibrose et précédemment traités par un inhibiteur de JAK. Le momelotinib peut être administré et maintenu à pleine dose car il ne supprime pas l'activité de la moelle osseuse comme les autres inhibiteurs de JAK.
Vers des approches combinées
La myélofibrose est une maladie hématologique maligne chronique caractérisée par des symptômes constitutionnels, une fibrose de la moelle osseuse, une hématopoïèse extramédullaire entraînant une splénomégalie et une propension à la progression leucémique. Étant donné le rôle central de la voie JAK-STAT dans la pathobiologie de la myélofibrose, les inhibiteurs de JAK constituent le pilier de la gestion pharmacologique actuelle.
Bien que ces traitements aient permis d'améliorer de manière significative la splénomégalie et le fardeau symptomatique, les inhibiteurs de JAK n'ont pas d'impact significatif sur la progression de la maladie. De plus, de nombreux patients sont inéligibles en raison de cytopénies liées à la maladie, qui sont exacerbées par les inhibiteurs de JAK. Par conséquent, les efforts se poursuivent pour identifier des cibles en dehors de la voie JAK-STAT.
En améliorant l’anémie, le momelotinib pourrait entrer dans des associations avec d'autres agents expérimentaux en cours de développement afin de mieux contrôler les symptômes de la myélofibrose. Le suivi de ces patients est en cours dans une étude ouverte sur la survie à long terme.