Dermatologie
Psoriasis : TYK2, une nouvelle cible thérapeutique prometteuse
Un inhibiteur de TYK2 par voie orale ouvre une nouvelle voie prometteuse dans le psoriasis cutané dans une phase 2. Les phases 3 sont en cours.
- Egor Kulinich/istock
Le psoriasis est une maladie inflammatoire chronique de la peau qui impacte la qualité de vie des patients. Malgré les avancées thérapeutiques, notamment avec les biothérapies ciblant l'axe IL-23/Th-17, les traitements oraux efficaces et bien tolérés restent peu nombreux. Dans ce contexte, TYK2 est une enzyme clé impliquée dans la signalisation intracellulaire des cytokines, telles que l'interleukine-23 (IL-23) et l'interleukine-12 (IL-12), qui sont cruciales dans la pathogenèse de cette affection.
Dans un essai clinique randomisé, dont les résultats sont publiés dans JAMA Dermatology, l'inhibition sélective de TYK2 par le zasocitinib, à des doses orales de 5 mg ou plus, une fois par jour, entraînerait une plus grande clairance cutanée que le placebo sur 12 semaines.
Une efficacité dose-dépendante
L’objectif principal de l’étude était d’évaluer la proportion de patients atteignant une amélioration de 75 % ou plus du score PASI (PASI 75) à la semaine 12. Les résultats montrent que le PASI 75 est atteint chez 68 % des patients recevant 15 mg de zasocitinib et chez 67 % des patients recevant 30 mg, contre seulement 6 % dans le groupe placebo. Ces résultats montrent une efficacité dose-dépendante significative, dès 5 mg de zasocitinib.
Les critères secondaires, incluant le PASI 90 et PASI 100, suivent une tendance similaire. Le PASI 90 est atteint par 45 % des patients sous 15 mg et 46 % sous 30 mg, tandis que le PASI 100 est obtenu chez 33 % des patients sous 30 mg. De plus, le score PGA de 0 ou 1 est observé chez 49 % des patients sous 15 mg et 52 % sous 30 mg de zasocitinib.
Les améliorations sont visibles dès la quatrième semaine de traitement et se sont maintenues jusqu’à la fin de l'étude.
Une étude randomisée de phase 2
Il s’agit d’une étude clinique de phase 2b, randomisée, en double aveugle et versus placebo. Elle a été menée pour évaluer l'efficacité, la sécurité et la tolérance du zasocitinib chez des patients atteints de psoriasis en plaques modéré à sévère. L'essai, réalisé de 2021 à 2022 dans 55 centres aux États-Unis et au Canada, a inclus 287 patients âgés de 18 à 70 ans avec un score PASI (Psoriasis Area and Severity Index) de 12 ou plus, un score d'évaluation globale du médecin (PGA) de 3 ou plus, et une surface corporelle affectée par le psoriasis d'au moins 10 %.
Les patients ont été randomisés pour recevoir soit un placebo, soit l'une des quatre doses de zasocitinib (2, 5, 15, ou 30 mg) quotidiennement pendant 12 semaines.
Sécurité et tolérance
Les événements indésirables émergents du traitement sont plus fréquents dans les groupes zasocitinib (53 % à 62 %) comparativement au placebo (44 %). Cependant, aucun événement indésirable spécifique n'a montré de dépendance à la dose.
Les événements indésirables les plus courants ont été la Covid-19, une acné et une diarrhée. Deux événements indésirables graves non liés au traitement ont été rapportés, et il n'y a eu aucun cas d'événements cardiovasculaires majeurs, thromboemboliques ou d'infections opportunistes.
Perspectives intéressantes
Le psoriasis est largement médié par l'activation de l'axe IL-23/T-helper 17 (Th17), qui conduit à la production de cytokines pro-inflammatoires responsables de la prolifération excessive des kératinocytes et de l'inflammation cutanée. TYK2, en tant que médiateur de la signalisation des récepteurs de l'IL-23 et de l'IL-12, participe activement à cette cascade inflammatoire en activant les voies JAK-STAT (Janus kinase-signal transducer and activator of transcription), qui régulent l'expression des gènes pro-inflammatoires.
Les études génétiques ont montré que des variantes de perte de fonction de TYK2 sont associées à une protection contre plusieurs maladies inflammatoires, y compris le psoriasis. Cela a conduit à l'hypothèse que l'inhibition sélective de TYK2 pourrait être une stratégie thérapeutique efficace pour traiter le psoriasis en limitant la réponse inflammatoire sans les effets secondaires associés aux inhibiteurs plus larges des Janus kinases (JAK), qui affectent plusieurs voies JAK-STAT.
Cette étude confirme le potentiel d’un inhibiteur sélectif de TYK2, en tant que traitement oral du psoriasis modéré à sévère. Les résultats montrent que le zasocitinib peut offrir un niveau d’efficacité comparable ou proche de celui de certaines biothérapies, avec une clearance complète de la peau atteinte chez un tiers des patients après 12 semaines de traitement. L’absence d’effets secondaires graves associés à cet inhibiteur de JAK, et la réponse dose-dépendante, suggèrent que le zasocitinib pourrait devenir une option thérapeutique privilégiée pour les patients ne répondant pas, ou tolérant mal les traitements oraux actuels.
Toutefois, des études de phase 3 plus larges et de plus longue durée sont nécessaires pour confirmer ces résultats préliminaires, y compris versus biothérapie, et évaluer l’innocuité de cet inhibiteur de JAK sur le long terme, en particulier au plan cardiovasculaire et thrombotique. Deux de ces études sont déjà en cours.