Hématologie
Lymphome B diffus à grandes cellules gastrique : quel traitement proposer en première ligne ?
Le lymphome B diffus à grandes cellules (DLBCL) primitif de l’estomac est une entité rare dont le traitement repose sur l’immunochimiothérapie de type R-CHOP. Si les résultats thérapeutiques sont satisfaisants (77% de survie sans-progression et 81% de survie globale à 3 ans), les auteurs de cette étude ont étudié une cohorte rétrospective internationale afin d’évaluer les résultats et les modalités de traitement de ces patients.
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Le lymphome B diffus à grandes cellules (DLBCL) primitif de l’estomac est un type rare de lymphome extranodal, dont l’évolution est insidieuse avec l’existence de symptômes gastro-intestinaux aspécifiques 1. Sur le plan de la pathogénèse, la stimulation antigénique chronique et l'inflammation contribuent à la maladie, notamment par le biais d'une infection et de la colonisation par H. pylori.
Les progrès de l’immunochimiothérapie, avec ou sans radiothérapie, est aujourd’hui le standard de traitement tandis que les patients présentant une infection active par H. pylori peuvent avoir recours à une éradication antibiotique2. La radiothérapie peut également être proposée en cas de maladie volumineuse ou réfractaire tandis que l'intervention chirurgicale est généralement limitée à certains cas (perforation, obstruction, saignement gastro-intestinal non-contrôlé).
Si les résultats thérapeutiques semblent satisfaisants (77% de survie sans-progression et 81% de survie globale à 3 ans), les auteurs de cette étude rétrospective ont évalué les résultats et les modalités de traitement des patients atteints de DLBCL primitif de l’estomac 3.
Une cohorte multicentrique internationale
Cette étude rétrospective, internationale et multicentrique, a inclus 37 patients traités entre le 1er janvier 2006 et le 1er janvier 2019 à la suite du diagnostic d’un DLBCL primitif de l’estomac. Parmi ces patients, 23 étaient des hommes (62%) et l'âge médian était de 64 ans (plage : 33-87 ans). Soixante-treize pourcents des patients présentaient une élévation des LDH sériques et 95% présentaient un PS ECOG ≤2. L'anémie était fréquente (49%), avec une hémoglobine <100 g/L chez cinq patients. L'indice pronostique international (IPI) médian de la cohorte était de 1 (plage : 0-2).
En termes de localisation anatomique, 57% des lésions étaient dans le corps de l’estomac, 51% dans l’antre, 14% dans le fundus et 3% dans le cardia. Parmi les 32 données histologiques disponibles, tous les patients présentaient un DLBCL : 59% des patients (n=19) étaient d'origine centrogerminative, 22% (n=7) d'origine non- centrogerminative et 19% (n=6) étaient non classifiables. Soixante-dix pour cent (n=26) de la cohorte avaient subi un test documenté pour H. pylori, dont 69% étaient positifs (n=18).
Une efficacité indiscutable de l’immunochimiothérapie
Tous les patients ont reçu une immunochimiothérapie, dont 91% (n=34) du R-CHOP, 2 patients du R-CEOP et 1 patient du R-CHEP. La radiothérapie a été administrée chez 35% (n=13) des patients à une dose variant de 30 à 36 Gy (médiane de 30 Gy) avec administration sur 15 à 24 fractions. Onze des 18 patients positifs pour H. pylori ont reçu une thérapie d'éradication.
Avec une durée médiane de suivi de 42 mois, les taux de survie sans-progression (SSP) et de survie globale (SG) à 4 ans étaient de 86% (95%CI : 70–94) et de 89% (95%CI : 73–96) respectivement. Vingt-huit patients obtenaient une réponse métabolique complète post-immunochimiothérapie et les patients ne recevant pas de radiothérapie adjuvante présentaient une SSP supérieure (HR 0,2, p=0,02, IC à 95 % : 0,03–0,7).
Chez les patients positifs pour H. pylori, l'éradication d’H. pylori n'était pas associée à une amélioration de la SSP (HR 0,8, p=0,79, 95%CI : 0,2–4,3) ou de la SG (HR 0,9, p=0,84, 95%CI : 0,1–5,0) chez les patients positifs pour H. pylori. Finalement, les tumeurs ≥7,5 cm n'était pas associée à une SSP ou une SG inférieures (p=0,73 et p=0,39).
Le TEP intermédiaire n’influence pas la réponse thérapeutique !
Parmi les 57% de patients (n=21) ayant réalisé des TEP, 71% (n=15) obtenaient une réponse métabolique complète et 29% une réponse métabolique partielle. Il n’existait aucune différence en termes de SSP ou de SG entre les patients Deauville 1–3 et les patients Deauville 4–5 (respectivement HR 1,4, p = 0,71, 95%CI de 0,2–9,9 et HR 1,0, p = 0,96, 95%CI de 0,1–9,1).
Tous les patients présentant une réponse métabolique partielle au TEP intermédiaire (Deauville 4, n=6) obtenaient une réponse complète à la fin du traitement.
Conclusion
Les patients atteints de DLBCL primitif de l’estomac présentent d’excellents résultats thérapeutiques au décours d’une immunochimiothérapie par R-CHOP.
L’adjonction de radiothérapie et/ou l’éradication de H. pylori ne permettent pas d’améliorer les données tandis que l’évaluation intermédiaire par TEP-scanner n’influence pas la réponse de fin de traitement.
Références
- Koch P, del Valle F, Berdel WE, et al. Primary gastrointestinal non-Hodgkin's lymphoma: I. Anatomic and histologic distribution, clinical features, and survival data of 371 patients registered in the German Multicenter Study GIT NHL 01/92. J Clin Oncol 2001;19:3861-73.
- Kuo SH, Yeh KH, Wu MS, et al. Helicobacter pylori eradication therapy is effective in the treatment of early-stage H pylori-positive gastric diffuse large B-cell lymphomas. Blood 2012;119:4838-44; quiz 5057.
- Lewis CS, Joy G, Jensen P, et al. Primary gastric diffuse large B-cell lymphoma: A multicentre retrospective study. Br J Haematol 2024.