Cardiologie
HTA ou diabète de la grossesse : le suivi cardiovasculaire en postpartum est indispensable
Moins d’un cinquième des patientes ayant eu une hypertension gravidique ou un diabète gestationnel auraient un dépistage cardiovasculaire en post-partum alors que ceux-ci sont recommandés. Cette sous-évaluation de risques majeurs après une grossesse pathologique appelle à réviser la prise en charge et la sensibilisation après la grossesse.
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- Zinkevych/istock
Les maladies cardiovasculaires restent la première cause de mortalité chez les femmes. Des données récentes indiquent qu’une hypertension, ou un diabète, liés à la grossesse accroissent notablement le risque d’évènements cardiovasculaires ultérieurs (accident vasculaire cérébral et cardiopathie). Les recommandations internationales préconisent donc un dépistage précoce du diabète, des dyslipidémies et de l’hypertension artérielle chez ces patientes après l’accouchement.
Afin de vérifier si ces mesures sont effectivement mises en pratique, une équipe de chercheurs de l’ICES et du Sunnybrook Health Sciences Centre (Canada) a examiné, entre 2002 et 2019, plus d’un million de grossesses en Ontario. Les auteurs ont comparé le taux de dépistage du diabète et des dyslipidémies dans les trois années suivant l’accouchement entre un groupe de patientes ayant eu une hypertension gravidique ou un diabète gestationnel (groupe exposé) et un groupe sans ces problèmes (groupe non exposé).
Les résultats, publiés dans la revue Circulation, sont préoccupants : seules 17% des femmes chez qui on avait diagnostiqué une hypertension ou un diabète pendant la grossesse ont eu un dépistage de ces mêmes facteurs de risque cardiovasculaire dans l’année suivant leur accouchement. Sur trois ans, ce taux n’atteint que 44%. Fait encore plus notable, 33% des patientes sans antécédent gestationnel de diabète ou d’hypertension ont néanmoins eu un dépistage cardiovasculaire dans la même période, ce qui souligne la méconnaissance possible sur l’intérêt de ce suivi chez les patientes à risque.
La recherche d’une hyperlipidémie encore moins fréquente
Le dépistage des dyslipidémies (cholestérol, triglycérides) se révèle significativement moins fréquent que celui du diabète au cours du suivi. Cette disparité suggère que le simple accès au système de santé ne constitue pas le principal frein au dépistage, car les analyses glycémiques semblent plus systématiquement proposées. Les investigateurs estiment qu’il existe un manque d’information, tant chez les médecins que chez les patientes, quant à l’importance de dépister l’ensemble des facteurs de risque (dont les lipides) après un épisode d’hypertension ou de diabète gestationnel. Mais il est possible que ce dépistage d’une dyslipidémie ait été réalisé au moment de la première consultation de la grossesse.
Cette insuffisance de suivi demeure particulièrement préoccupante, car les études établissent un lien de plus en plus clair entre les complications obstétricales et la santé vasculaire à long terme. Et les femmes de plus de 50 ans ne sont pas les seules concernées : toute patiente qui un trouble tensionnel ou métabolique pendant la grossesse voit son risque cardiovasculaire augmenter, quelle que soit son histoire clinique antérieure.
Dépistage systématique après toute HTA ou tout diabète pendant la grossesse
Pour réduire ce risque cardiovasculaire à long terme, un dépistage systématique s’impose donc après toute grossesse compliquée par une hypertension ou un diabète. Il conviendrait non seulement de mesurer régulièrement la glycémie et la pression artérielle, mais aussi d’évaluer le profil lipidique, même en l’absence de signes cliniques. Les professionnels de santé et les patientes doivent être sensibilisés à l’intérêt majeur d’un tel suivi, dont l’initiative peut émaner autant du médecin généraliste que du cardiologue ou du gynécologue-obstétricien.
Selon les auteurs, intégrer ces contrôles métaboliques et tensionnels dans le bilan postpartum standard faciliterait leur systématisation. L’éducation thérapeutique et les consultations de suivi, éventuellement coordonnées par la sage-femme ou le médecin traitant, pourraient également améliorer les résultats. Pour l’avenir, des travaux complémentaires devront évaluer l’efficacité de ces approches intégrées et examiner si l’inclusion d’autres marqueurs (par exemple, des tests de dépistage précoce de l’athérosclérose) contribuerait à identifier plus précisément les femmes à haut risque.
Cette approche plus globale s’inscrit bien sûr dans une démarche de prévention cardiovasculaire élargie, incluant la promotion d’un mode de vie sain, la prise en charge des facteurs de risque et un suivi adapté afin d’améliorer la santé vasculaire sur le long terme.