Psychiatrie

Dépendance à l’alcool : réduction significative de la consommation sous semaglutide

Un agoniste du GLP-1, le semaglutide, initialement développé comme antidiabétique et dans l’obésité, pourrait réduire la quantité d’alcool consommée. Selon la première étude randomisée de phase 2 de ce type, une faible dose de semaglutide diminuerait la prise d’alcool et l’envie de boire (« craving ») chez les alcooliques.

  • KatarzynaBialasiewicz/istock
  • 13 Fév 2025
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    Le rationnel de cette étude repose sur la charge croissante de l’alcoolisme, encore peu traité car dépourvu de réels traitements. Les agonistes du GLP-1, dont l’efficacité est avérée pour le contrôle glycémique et la perte de poids, suscitent l’intérêt du fait de signaux précliniques et observationnels pointant une possible réduction de la consommation d’alcool. Menée auprès de 48 adultes (âge moyen de 39,9 ans, 71 % de femmes) non motivés pour arrêter l’alcool, cette étude randomisée en double aveugle a évalué l’administration sous-cutanée de semaglutide à faible dose (0,25 mg/semaine puis 0,5 mg/semaine) sur 9 semaines et ses résultats sont publiés dans JAMA Psychiatry.

    Le critère de jugement principal, la quantité d’alcool consommée dans un test standardisé, est réduit dans le groupe semaglutide, avec des tailles d’effet moyennes à fortes (par exemple, β = −0,48 ; IC à 95 %, −0,85 à −0,11) pour la quantité ingérée en grammes. Les participants ont également une diminution significative de l’intensité de leur envie de boire (« craving ») (β = −0,39 ; IC à 95 %, −0,73 à −0,06) et du nombre de verres consommés les jours de consommation (β = −0,41 ; IC à 95 %, −0,73 à −0,09).

    Reduction des jours de forte consommation d’alcool

    De plus, un effet favorable a été observé sur la proportion de journées de forte consommation (« heavy drinking days »), qui a diminué plus nettement dans le groupe semaglutide. Concernant la tolérance, on n’a pas relevé d’événements indésirables inhabituels, mais une perte de poids d’environ 5% a été notée, rappelant la nécessité de veiller à la sécurité des doses plus élevées chez les sujets dont l’IMC n’est pas toujours élevée.

    Par ailleurs, une analyse exploratoire dans le sous-groupe fumeur suggère un bénéfice modeste mais statistiquement significatif sur la diminution du nombre de cigarettes consommées par jour (β = −0,10 ; IC à 95 %, −0,16 à −0,03).

    Un petit essai de phase 2 proof of concept

    Ces données proviennent d’un essai contrôlé de phase 2 d’une durée relativement courte (9 semaines), utilisant une méthodologie rigoureuse mais appliquée à un échantillon restreint et peu représentatif des formes sévères d’AUD. Le recours à une faible posologie de semaglutide était justifié par des considérations de sécurité, au risque de sous-estimer des effets potentiellement plus marqués aux doses plus élevées (jusqu’à 2,4 mg/semaine en obésité).

    Selon les auteurs, ces premiers résultats, cohérents avec la littérature expérimentale sur les agonistes du GLP-1, soulignent l’intérêt de poursuivre avec des études plus longues et à plus grande échelle afin de déterminer la place des agonistes du récepteurs du GLP-1 dans la prise en charge de l’alcoolisme chronique. Si des essais cliniques de phases 3 confirment une réduction robuste de la consommation d’alcool, ces traitements pourraient surmonter de nombreux freins liés à la faible efficacité des médicaments anti-addiction existants.

    Une généralisation future dans les soins de premier recours, au vu du large déploiement actuel des agonistes du GLP-1, ouvrirait alors la voie à une nouvelle approche thérapeutique pour limiter l’impact sanitaire majeur de l’abus d’alcool, qu’il s’agisse de réduire la mortalité, les maladies hépatiques ou de prévenir les risques liés aux consommations croisées (tabac, obésité).

     

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    JDF

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