Néphrologie
Greffe rénale : pas plus de risque d’HTA ou d’insuffisance rénale chez les donneurs vivants
Le risque d’hypertension à 7 ans n’augmente pas après le don du vivant chez les donneurs de rein normotendus et aucune différence significative dans la pression artérielle moyenne ou la décroissance de la fonction rénale n’est observée par rapport aux non donneurs.
- jacoblund/istock
La transplantation rénale à partir d'un donneur vivant est considérée comme la meilleure option de traitement pour la plupart des patients insuffisants rénaux, car elle présente des taux de survie de greffon supérieurs et des délais d'attente plus courts par rapport à une transplantation à partir d'un donneur décédé.
Donner un rein est considéré comme sûr pour des candidats soigneusement sélectionnés. Les complications périopératoires graves suite à la néphrectomie, y compris le décès, sont rares. Bien que les donneurs perdent la moitié de leurs glomérules avec la néphrectomie, le rein restant subit une hyperfiltration adaptative, et en un an, le taux de filtration glomérulaire estimé (eGFR) atteint 60 % à 75 % des niveaux avant la donation. Sur plusieurs décennies de suivi, la plupart des études indiquent que le don n'augmente pas le risque de décès.
Y a-t-il un risque d’HTA et d’insuffisance rénale sur le long terme ?
Dans des études de qualité médiocre, un risque accru d'insuffisance rénale a été observé chez les donneurs par rapport aux non-donneurs, bien que la probabilité de développer une insuffisance rénale dans les 15 premières années après le don soit inférieure à 0,5 % pour la plupart des donneurs. L'hypertension et l'albuminurie peuvent être plus fréquentes chez les donneurs dans la décennie suivant la néphrectomie. Il n’est donc pas certain que les risques observés soient attribuables à la néphrectomie, plutôt qu’à des facteurs héréditaires ou à une plus grande fréquence des suivis chez les donneurs par rapport aux non-donneurs.
Dans une large étude de cohorte prospective sur les donneurs de rein vivants et les non-donneurs présentée au congrès de l’European Renal Association (ERA) et publiée dans le JAMA, les risques d'hypertension et d'albuminurie ne sont pas significativement différents entre les 2 groupes. Après la baisse initiale de l'eGFR due à la néphrectomie, les donneurs ont un taux moyen de déclin de l'eGFR plus lent que les non-donneurs, mais sont malgré tout plus susceptibles d'avoir un eGFR compris entre 30 et 60 mL/min/1,73 m2 au moins une fois lors du suivi.
Une large étude prospective
Une étude canadienne de cohorte prospective sur des donneurs de rein vivants et des non-donneurs au Canada et en Australie a impliqué 924 donneurs de rein vivants répondant aux critères standard, inscrits avant la chirurgie, et un échantillon témoin de 396 non-donneurs. Le recrutement s'est déroulé de 2004 à 2014 dans 17 centres de transplantation (12 au Canada et 5 en Australie), avec un suivi jusqu'en novembre 2021. Les donneurs et les non-donneurs ont suivi le même calendrier annuel d'évaluations de suivi.
Les donneurs étaient plus susceptibles que les non-donneurs d'avoir des antécédents familiaux d'insuffisance rénale (464/922 [50 %] contre 89/394 [23 %], respectivement). Après pondération statistique basée sur un score de propension, les caractéristiques de base étaient similaires entre les deux groupes.
Pas plus d’HTA et une décroissance identique de la fonction rénale
Pendant un suivi médian de 7,3 ans (IQR, 6,0-9,0), dans l'analyse pondérée, l'hypertension est survenue chez 161 des 924 donneurs (17 %) et 158 des 928 non-donneurs (17 %) (RR pondéré, 1,11 [IC à 95 %, 0,75-1,66]). Le changement longitudinal de la pression artérielle moyenne est similaire chez les donneurs et les non-donneurs.
Après la diminution initiale de l'eGFR des donneurs après la néphrectomie (moyenne, 32 mL/min/1,73 m2), les donneurs ont eu un déclin annuel moyen de l'eGFR de 1,4 mL/min/1,73 m2 (IC à 95 %, 1,2-1,5) inférieur à celui des non-donneurs. Cependant, plus de donneurs que de non-donneurs ont eu un eGFR compris entre 30 et 60 mL/min/1,73 m2 au moins une fois lors du suivi (438/924 [47 %] contre 49/928 [5 %]). L'albuminurie est survenue chez 132 des 905 donneurs (15 %) et 95 des 904 non-donneurs (11 %) (rapport de risque pondéré, 1,46 [IC à 95 %, 0,97-2,21]) ; la différence pondérée entre les groupes dans le ratio albumine/créatinine est de 1,02 (IC à 95 %, 0,88-1,19).
Ces résultats sont essentiels pour améliorer notre compréhension des risques à long terme associés au don de rein vivant et pour améliorer la qualité des recommandations cliniques futures sur la transplantation rénale.