Santé et environnement
L’exposition des hommes aux PFAS peut affecter leurs enfants, pointe une nouvelle étude
Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) modifient la méthylation des spermatozoïdes, entraînant des changements dans l’expression des gènes dans la graisse et le foie de la progéniture des hommes exposés.
Une nouvelle étude pointe à la fois le fait que la spermatogenèse est une fenêtre sensible de développement avant la conception, et l’impact de l’exposition aux substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) sur les spermatozoïdes des hommes exposés. “Les PFAS sont associés à de nombreuses maladies chroniques et peuvent par exemple avoir un impact sur l’inflammation et le système immunitaire, explique l’un des auteurs de la recherche, le Pr Michael C. Petriello, professeur adjoint de sciences de la santé environnementale et de pharmacologie à l’école de médecine de l’université d'État de Wayne aux États-Unis. Ce travail se concentre sur les résultats en matière de reproduction, la fertilité et le métabolisme de la progéniture. L’idée selon laquelle l’exposition du père pourrait affecter la santé de sa progéniture est entièrement nouvelle.”
Ces travaux, intitulés “Les mélanges de substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS) modifient la méthylation des spermatozoïdes et la reprogrammation à long terme du foie et du transcriptome des graisses de la progéniture”, ont été récemment publiés dans Environment International.
“Une baisse de la fertilité masculine dans le monde entier”
“Au cours des dernières décennies, la fertilité masculine a diminué dans le monde entier, la baisse la plus importante se produisant dans les pays à forte production de produits chimiques perturbateurs endocriniens”, notent les auteurs en préambule de leur publication.
Dans cette étude, ils ont utilisé des souris mâles qui ont été nourries avec un régime riche en graisse pour imiter l’alimentation occidentale, et exposées à un mélange de cinq PFAS via l’eau potable. La reproduction s’est par la suite faite avec des femelles non exposées, afin d’examiner l’impact de l’exposition paternelle sur la progéniture, qui a elle-même été nourrie avec un régime normal.
L’exposition aux PFAS avant la conception peut être transmise à la génération suivante
Les résultats de l’équipe démontrent que l’exposition aux PFAS chez ces souris mâles adultes a entraîné une “méthylation aberrante des spermatozoïdes” [des modifications chimiques qui interviennent pour réguler l'expression des gènes sans modifier la séquence d'ADN, ndlr] et une “expression génétique altérée du foie et de la graisse de la progéniture d'une manière spécifique au sexe”. Selon eux, ces données indiquent que l’exposition aux PFAS avant la conception chez les hommes peut être transmise et affecter le phénotype de la génération suivante.
“Le fardeau a toujours pesé sur la santé maternelle pendant la grossesse en ce qui concerne la santé de la progéniture, a déclaré l’auteur principal de l’étude, le Pr J. Richard Pilsner, professeur d’obstétrique et de gynécologie et directeur associé du CS Mott Center for Human Growth and Development. Cette recherche montre que la santé environnementale avant la conception est également un facteur clé qui affecte la santé et le développement de la progéniture.”
“J’espère que ces résultats favoriseront une appréciation de la santé masculine sur le développement de leur progéniture”, a ajouté le Pr Pilsner. Selon le chercheur, il faudrait que les médecins informent davantage les partenaires masculins que leur santé avant la conception a un impact sur la future santé de leurs enfants. “Cela constituerait un changement important qui aurait un impact positif sur les générations futures.”
D’autres études sont maintenant nécessaires pour mieux comprendre l’effet des PFAS au niveau individuel et lorsqu’ils sont combinés.
Où trouve-t-on des PFAS ?
Les PFAS sont des substances chimiques utilisées dans de nombreux produits du quotidien pour leurs propriétés, comme les textiles, les emballages alimentaires, les mousses anti-incendie, les gaz réfrigérants, les revêtements antiadhésifs, les cosmétiques, les dispositifs médicaux ou encore les produits phytopharmaceutiques. Très persistants dans l’environnement, ces composés s’accumulent dans les organismes vivants, dans les plantes et les animaux, se retrouvant de fait, dans la chaîne alimentaire. Ils sont également présents dans l’eau que nous buvons et l’air que nous respirons.
Actuellement, des initiatives au niveau français et européen ont été lancées pour réduire, voire interdire l’usage de ces polluants éternels, mais les procédures sont lentes et font face à une levée de boucliers de nombreuses industries.