Pollution des sols
Cadmium : attention, vos céréales du petit déjeuner sont sûrement trop contaminées
Cancers, néphropathies, maladies osseuses… le cadmium pollue trop les sols, contaminant notre alimentation et augmentant ainsi nos risques de développer bon nombre de pathologies, alerte l’ASEF (Association Santé Environnement France).
Si l’on entend beaucoup parler du glyphosate ces derniers temps, notamment à cause du renouvellement pour 10 ans de son autorisation dans l’UE par la Commission européenne, l'insecticide n’est malheureusement pas la seule substance présentant des risques pour notre santé. Et pour cause, chaque année, c’est également plusieurs tonnes d’engrais qui sont épandues sur les sols agricoles français. “Les engrais importés en France viennent d’une région du monde où la présence de cadmium est trop importante pour les objectifs sanitaires, alerte l’ASEF dans un communiqué publié ce 9 novembre 2023. Les sols accumulent le cadmium qui ne peut en sortir que par les plantes.”
Cadmium : quels sont les risques liés à son exposition ?
Le cadmium est un métal omniprésent dans l’environnement qui est reconnu cancérogène, mutagène et toxique pour la reproduction. “Le cadmium entraîne chez l’Homme des atteintes rénales et une fragilité osseuse lors d’une exposition prolongée, notamment par voie orale via l’alimentation et l’eau de boisson”, précise l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail). L’ASEF ajoute qu’une exposition orale prolongée induit un risque accru de cancer pour plusieurs organes dont les poumons, la prostate, les reins et le pancréas. “En effet, le cadmium agit sur les mitochondries, induit un stress oxydatif, entraînant des dommages aux protéines, aux lipides et à l'ADN. Le cadmium diminue l'activité des enzymes de réparation de l'ADN, influençant la prolifération du cycle cellulaire et stimulant la cancérogenèse.”
Céréales, viennoiseries… Pourquoi retrouve-t-on du cadmium dans les aliments ?
Les sources principales d’exposition de la population à cette substance sont le tabac actif et/ou passif, et l’alimentation. Si on en retrouve tant dans nos aliments, c’est à cause des “épandages d’engrais minéraux phosphatés par les agriculteurs”, explique l’ASEF. Cela entraîne la pénétration du cadmium dans les végétaux par leurs racines, le faisant ainsi entrer dans la chaîne alimentaire.
Les denrées les plus touchées par la présence de cadmium sont les légumes, les pommes de terre et les céréales. “Parmi les personnes les plus exposées, [on retrouve] les enfants notamment à cause des céréales du petit déjeuner”, alarme l’association. Ainsi, 18 % des enfants “dépassent déjà la concentration critique de cadmium urinaire définie par l’ANSES [0,1 microgramme de cadmium par gramme de créatinine dans les urines avant 11 ans, NDLR], notamment chez ceux qui mangent des céréales au petit déjeuner”. Dans un communiqué publié en juillet 2022, la Haute Autorité de Santé précisait également que “les aliments qui contribuent le plus aux apports de cadmium chez les jeunes enfants sont les céréales, les petits-pots (probablement du fait de leur teneur en riz et/ou en pomme
de terre) et les pommes de terre”.
Chez les adultes français, différentes études menées en 2006-2007 et 2014-2016 montrent que l'imprégnation moyenne au cadmium a augmenté de 75 %. Cette surimprégnation “touche 47 % des adultes”, indique l’ASEF.
Diminuer les teneurs de cadmium dans les engrais
Pour réduire l’accumulation de cadmium dans les sols et son transfert dans la chaîne alimentaire, il faut obtenir “une teneur en cadmium inférieure ou égale à 20mg/kg dans les engrais minéraux phosphatés”, détaille l’association. Or, les arrêtés et décrets actuellement en cours de discussion (et soumis à la consultation publique jusqu’au 30 novembre), proposent une valeur de 60 milligrammes par kilogramme d’engrais. “Cette valeur de 60mg/kg a déjà été adoptée en Europe en 2019 mais la France, malgré les alertes de SPF, autorisait jusqu’ici encore 90mg/kg”, précise l’ASEF qui ajoute que plusieurs pays européens comme la Finlande ou la Slovaquie ont déjà adopté le seuil de 20mg/kg sur leurs territoires.
Mais concrètement, comment peut-on diminuer les concentrations de cadmium ? Il y a plusieurs solutions. La première consiste à acheter les engrais dans des pays où les gisements sont moins contaminés. Si cela n’est pas possible, notamment à cause du contexte géopolitique avec la Russie, pays qui possède les gisements les plus pauvres en cadmium, il est possible de décontaminer localement la production, mais cela peut faire fortement monter les prix. “Une aide aux agriculteurs pour qu’ils n'aient pas à supporter ce surcoût éventuel permettrait de limiter ce risque sanitaire”, estime l’ASEF.
La dernière solution consisterait à réduire l’utilisation d’engrais, mais cela demande beaucoup de paramètres à prendre en compte pour les agriculteurs qui n’ont pas forcément les moyens d’y faire face.
En attendant, il est possible à notre échelle de réduire notre consommation de cadmium, en privilégiant les produits issus de l’agriculture biologique, qui n’utilise pas ces engrais chimiques et contient donc “en moyenne moins de 48 % de cadmium d’après l’étude Baranski (2014)”.