Pneumologie

Dépister des grossesses à risque en recherchant une limitation nocturne des débits ventilatoires ?

L’évaluation de la limitation nocturne des débits ventilatoires permettrait de dépister précocement des grossesses à risque, avant l’installation des apnées du sommeil.  Toutefois, la surmédicalisation des femmes présentant d’autres critères de grossesse à risque pourrait limiter l’utilisation larga manu de cet indice de dépistage. D’après un entretien avec Wojciech TRZEPIZUR.

  • 30 Mai 2024
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    Une étude, dont les résultats sont parus en avril 2024, dans l’European Respiratory Journal, a chercher à élaborer une nouvelle mesure objective de la limitation du débit ventilatoire nocturne au cours de la grossesse pour identifier une augmentation du risque de complications. Pour cela, les auteurs ont établi des scores de gravité de la limitation du débit, obtenus à partir des tests de sommeil à domicile, chez des femmes en début et milieu de grossesse. Le critère de jugement principal était la survenue d’une pré-éclampsie, en ajustant avec l’âge maternel, l’indice de masse corporelle, l’origine ethnique, l’hypertension artérielle chronique et la limitation du débit ventilatoire lors de l’éveil. Les critères de jugement secondaires étaient l’hypertension gravidique, le diabète gestationnel et le poids du nourrisson à la naissance.

     

    De nouveaux index pour un dépistage précoce des femmes enceintes

    Le professeur Wojciech TRZEPIZUR, pneumologue, praticien hospitalier dans le service de pneumo-allergologie du Centre Hospitalier Universitaire d’Angers, explique que cette étude vient confirmer des données antérieures, issues d’une littérature, déjà présente, sur l’impact de l’apnée du sommeil au cours de la grossesse. En effet, l’apnée du sommeil augmente les risques de pré-éclampsie, d’hypertension gravidique, de diabète gestationnel et de faible poids de naissance du nourrisson. Il précise que les auteurs de ce travail sont partis du postulat qu’en dehors de la grossesse, beaucoup d’apnées sont nécessaires pour avoir des conséquences alors qu’au cours de la grossesse seules quelques apnées sont suffisantes pour entrainer des conséquences préoccupantes. Il sont ont donc estimé qu’il serait intéressant de trouver d’autres index permettant de détecter précocement ces femmes à risque et pour cela, ils ont utilisés des enregistrements anciens pour créer un nouveau marqueur, pré « apnée », correspondant à la limitation nocturne des débits ventilatoires, qui peut être présente chez les femmes qui n’ont pas d’apnée du sommeil.

     

    Attention à la surmédicalisation des grossesses à risque !

    Wojciech TRZEPIZUR rappelle que l’une des problématique de l’obstétrique est la surmédicalisation des grossesses. Les femmes ciblées par ce dépistage précoce sont les femmes plus âgées, obèses, hypertendues et diabétiques, donc déjà « hyper médicalisées » et  pour qui une contrainte supplémentaire pourrait être difficile à accepter, au cours de ce moment physiologie et heureux que représente la grossesse. Il souligne que les femmes enceintes ont déjà des troubles du sommeil et qu’ajouter une PPC serait mal vécu. Le chemin sera long pour trouver une alternative à cette prise en charge. Wojciech TRZEPIZUR fait référence à des travaux randomisés réalisés en 2023 qui ont montré que la moyenne d’utilisation de  la PPC est de 2,5 heures et que seulement 32% des patients ont accepté de l’utiliser plus de 4 heures, ce qui est le minimum.

     

    En conclusion,  cette étude montre une association entre les risques encourus lors de la grossesse et la limitation nocturne des flux ventilatoires mais ne démontre aucun lien de causalité, qui nécessiterait de l’interventionnel pour être prouvé. Ces résultats permettent donc de mieux cibler les patientes, sans aller plus loin et il est difficile de conclure avant la réalisation d’études complémentaires.

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