Rhumatologie

Prothèse de hanche ou de genou : une perte de poids postopératoire réduit le risque de révision prothétique

La perte de poids après chirurgie de hanche ou de genou, lorsqu’elle est initiée grâce à des traitements anti-obésité, s’associe à une diminution notable du risque de révision à 5 et 10 ans. Atteindre au moins 2 % de perte pondérale pourrait déjà suffire à améliorer la survie de l’implant.

  • 23 Fév 2025
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    Les arthroplasties de hanche et de genou comptent parmi les interventions chirurgicales électives les plus répandues, avec plus d’un million de procédures par an aux États-Unis. Malgré un taux de réussite global élevé, environ 1 % des patients subissent une révision annuelle, et le risque cumulé sur 10 ans peut atteindre 5 %. Parmi les facteurs de risque modifiables figure l’obésité, laquelle constitue une véritable épidémie mondiale. Les patients obèses opérés d’une prothèse sont 2 à 3 fois plus exposés aux complications postopératoires, y compris le risque infectieux pouvant conduire à une réintervention.

    Les traitements anti-obésité (orlistat, sibutramine, agonistes des récepteurs GLP-1, rimonabant) permettent une perte de poids satisfaisante et durable. Dans ce contexte, cette étude de cohorte, conçue selon l’approche de « target trial emulation », a inclus 3691 patients obèses ayant bénéficié d’une arthroplastie de hanche ou de genou, puis ayant initié un traitement pharmacologique de l’obésité.

    Les résultats, publiés dans JAMA Network Open, montrent que la perte de poids postopératoire (dans l’année suivant l’instauration du traitement) est associée à une baisse significative du risque de révision prothétique : à 5 ans, le taux de révision est de 5,6% pour les patients ayant un poids stable ou augmenté (< 2% de perte), contre 4,4% pour ceux ayant perdu 2% à 10% de leur poids, et 3,7% pour ceux ayant perdu ≥ 10 %. Par rapport au groupe « stabilisé / prise de poids », le risque relatif de révision diminue de 25% avec une perte modérée (HR = 0,75 ; IC à 95 % = 0,55-1,04) et de 43% avec une perte plus importante (HR = 0,57 ; IC à 95 % = 0,36-0,91).

    Une réduction du risque de reprise quelle que soit la prothèse

    L’analyse stratifiée selon le type d’arthroplastie corrobore ces tendances. Pour les patients porteurs d’une prothèse totale de genou, la perte de poids modérée et la perte de poids importante réduisent le risque de révision (HR = 0,55 et 0,49, respectivement). Chez les porteurs d’une prothèse totale de hanche, l’effet bénéfique s’observe surtout en cas de perte de poids importante (HR = 0,53 ; IC 95 % = 0,30-0,93). Les résultats sont par ailleurs cohérents à 10 ans.

    Les auteurs suggèrent que la diminution des contraintes mécaniques et l’amélioration des comorbidités métaboliques (telles que le diabète de type 2 ou l’hypertension) liées à la perte pondérale pourraient expliquer la baisse du risque de révision, notamment celles motivées par des complications infectieuses ou mécaniques. Concernant la tolérance, aucune augmentation notable d’effets indésirables liés aux traitements anti-obésité n’a été mise en évidence dans cette cohorte, suggérant un profil de sécurité acceptable de ces médicaments, déjà décrits comme relativement sûrs sur le long terme.

    Une émulation d’un essai randomisé à partir d’une base de données

    Les données proviennent de l’IQVIA Medical Research Database (IMRD), une importante base de dossiers de médecins généralistes, utilisée de 2000 à 2023. Cette étude a « émulé » un essai clinique idéal (target trial) en définissant soigneusement la période d’inclusion, l’intervention (groupes de perte de poids par traitements anti-obésité) et les critères de jugement (révision à 5 et 10 ans). Les chercheurs ont procédé à des ajustements pour les facteurs de confusion et appliqué des pondérations pour minimiser les biais de perte de suivi. Bien que certaines limites subsistent (notamment l’absence de données sur le type exact d’implant ou les causes précises de révision), la taille de l’échantillon et le suivi prolongé confèrent une bonne représentativité aux résultats.

    Selon les auteurs, ces données soutiennent l’idée qu’une stratégie associée de perte de poids, même modérée (≥ 2 % du poids initial), mise en œuvre après la pose de prothèse de hanche ou de genou, peut contribuer à prolonger la survie de l’implant. Au vu du nombre croissant de patients obèses opérés, l’utilisation de médicaments ou de traitements anti-obésité, associée à une prise en charge nutritionnelle et à un programme d’activité physique, apparaît comme une piste prometteuse pour réduire le risque de révision.

    En résumé, cette étude de cohorte en population générale met en évidence qu’après une arthroplastie chez des patients obèses, la perte de poids grâce à des médicaments anti-obésité réduit le risque de révision à moyen et long terme. Un changement de pratique, incluant un suivi pondéral postopératoire renforcé et une prise en charge pharmacologique ciblée, pourrait améliorer de façon notable la longévité des implants.

     

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    JDF

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