Soumission à l'autorité

Expérience de Milgram : des résultats similaires 50 ans plus tard

Des chercheurs ont réitéré l’expérience de Milgram, où des personnes obéissaient à l’ordre d’électrocuter des acteurs. Certains traits psychologiques semblent invariables.

  • Par Marion Guérin
  • kikkerdirk/Epictura
  • 16 Mar 2017
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    Vous vous souvenez de cette expérience, dans laquelle des scientifiques ordonnaient à des participants d’électrocuter d’autres personnes (en réalité des acteurs) afin de tester le degré de soumission de l’être humain à une autorité ? C’était en 1963 et les résultats faisaient froid dans le dos. La quasi-totalité des participants à « l’expérience de Milgram » envoyait la décharge maximale à ces pauvres victimes qui n’avaient rien fait et qui auraient toutes succombé, s’il ne s'était pas agi d’une simulation.

    Nous sommes en 2017 ; tous ceux qui ont eu vent de ces travaux les ont balayés d’un revers de main assuré : « Moi, jamais je n’aurais obéi ». C’est que depuis, il y a eu mai 1968, les printemps arabes, l’affirmation des peuples libres et la fragilisation de la notion d’autorité. En 2017, rebelles que sommes, nous n’aurions jamais électrocuté des innocents juste parce qu’une blouse blanche nous l’aurait ordonné… N’est-ce pas ?

    Servitude 

    Pas sûr. Des chercheurs ont entrepris de renouveler l’expérience afin d’évaluer le niveau de soumission de l’Homme moderne. Autant le dire : il n’a pas beaucoup changé, depuis les années 1960. En fait, les résultats suggèrent la même servitude face au pouvoir, le même phénomène de déresponsabilisation et d’absence d’empathie quand il s’agit de torturer autrui sur ordre.

    Pour des raisons éthiques, les auteurs, de la SWPS University of Social Sciences and Humanities (Pologne), n’ont pas réitéré le principe de l’électrocution – l’image de la chaise électrique étant un peu trop prégnante. A la place, ils ont mis au point un système de boutons progressifs, chacun délivrant un « choc » d'une intensité différente une fois pressé par les participants.

    Les femmes plus épargnées

    Pour l’expérience, 80 participants (40 hommes et 40 femmes) se sont livrés à ce « jeu »… et autant de bourreaux en puissance. En effet, selon ces travaux publiés dans la revue Social Psychological and Personality Science, 90 % des participants étaient là encore prêts à envoyer la dose maximale. Avec une nuance, toutefois : lorsqu’il s’agissait de torturer une femme, le taux de refus des participants était trois fois plus élevé. Le faible échantillon ne permet toutefois pas de tirer de conclusion, préviennent les auteurs. 

    « Notre étude a, encore une fois, illustré le pouvoir énorme de la situation à laquelle les sujets sont confrontés et à quel point ils peuvent facilement accepter des choses qu'ils trouvent désagréables », soulignent les chercheurs, qui viennent ainsi de démontrer l'invariabilité de la psychologie humaine.

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    JDF